OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Lui, président, implantera-t-il des fab labs ? http://owni.fr/2012/12/06/lui-president-implantera-t-il-des-fab-labs/ http://owni.fr/2012/12/06/lui-president-implantera-t-il-des-fab-labs/#comments Thu, 06 Dec 2012 16:35:13 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=127016

Jean, nouvel utilisateur du Fac Lab, le fab lab de l'Université de Cergy basé à Gennevilliers, fabrique une sculpture en bois (inspiré d'une oeuvre de George W Hart) avec la découpe laser . Le 6 décembre 2012. (cc) Ophelia Noor

Enfin ! Les fab labs et autres lieux dédiés à la fabrication numérique personnelle, sont arrivés aux oreilles du gouvernement français. Ce matin, une table ronde était organisée au cabinet de Fleur Pellerin sous la houlette d’Aymeril Hoang, conseiller innovation et économie numérique de la ministre déléguée aux PME, à l’Innovation et à l’Économie numérique.

Les fab labs en route vers le Grand Soir

Les fab labs en route vers le Grand Soir

Le Parti communiste français met le nez dans les fab labs. Avec comme une vieille envie de se remuer un peu le logiciel. Et ...

Intitulé “Développement des fab labs en France”, le séminaire avait surtout pour but de présenter deux visions de la fabrication personnelle, entre gros sous et visées moins directement lucratives. La quarantaine de participants étaient issus du ministère, de l’industrie comme PSA ou SEB et du microcosme numérique start-upers incontournable tel FaberNovel.

Fabien Eychenne de la Fing a d’abord présenté les fab labs, puis Emmanuelle Roux et Laurent Ricard ont exposé un cas concret avec leur FacLab, premier fab lab porté en France par une université. Enfin, Mark Hatch, le DG de TechShop, une chaine d’ateliers géants pour bricoleurs très pointus, est revenu sur sa société. La rencontre était d’ailleurs motivée par la venue de Mark Hatch, il ne s’agissait pas d’une initiative du cabinet.

L’entrepreneur a dévoilé ses plans de déploiement, en présence de Paul Duggan, en charge du développement en Europe : Paris, Londres, Milan… sont en ligne de mire, entre autres.

TechShop, s’il met en avant son côté communautaire – mais quelle société qui ne vit pas sur la planète Mars ne le fait pas ? – est une entreprise classique, déjà forte de six ateliers, tous aux États-Unis. Elle vise maintenant le vieux continent, forte de l’engouement pour la fabrication personnelle, dont les possibilités ont été décuplées par les machines-outils assistées par ordinateur et la force de partage et d’entraide propre à Internet. Elle se décrit ainsi :

Studio de prototypage et de fabrication, hackerspace, centre d’apprentissage, TechShop offre l’accès à de l’équipement et des logiciels d’une valeur d’un million de dollar.

Son appétit de déploiement rappelle celui des pionniers du PC dans les années 70-80. On va changer le monde, en se faisant des dollars au passage, pour votre bien et celui de l’économie en général puisque les TechShops sont des endroits idéaux pour faire du prototypage rapide et donc incuber son entreprise, entre autres. Le premier a d’ailleurs ouvert en 2006 à Menlo Park, au cœur de la Silicon Valley, où les hackers-futurs entrepreneurs tripatouillaient les machines au Homebrew computer Club. Google y serait aussi né, dans un garage bien sûr.

Success story

Devant les petits frenchies, Mark Hatch a fait la démonstration de son gros potentiel avec une présentation bien calibrée illustrée d’exemples propres à faire rêver. Une rafale de chiffres à faire pâlir en cette période de crise. Les participants ont pu voir la photo d’Obama au bureau oval tapotant sur son iPad avec une coque DODOcase. Le prototype du DODOcase a été conçu pour moins de 500 dollars et faisait cinq mois après son lancement 1 million de dollars de CA. Sans le TechShop, son idée serait restée au placard puisque sa réalisation requiert une machine qui coûte 25 000 dollars. Il a juste dû payer des frais d’entrée, 125 dollars par mois ou 1 395 dollars par an. Même parcours étincelant pour Square, un lecteur de carte de crédit que l’on branche sur son mobile ou sa tablette. Deux millions d’Américains l’utilisent maintenant, en versant au passage à chaque transaction une commission de 2,75%.

L’entreprise incarne l’état d’esprit maker, si cher aux Américains : une foi en la capacité créatrice qui a fait le succès du modèle américain, cette idée d’une nation qui se forge elle-même. Son slogan en témoigne :

Build your dream here. What do you want to make ?

En face, pour représenter les fab labs, nous avions donc Emmanuelle Roux et Laurent Ricard. Une tout autre vision, même si les deux types de lieux permettent de faire du prototypage rapide et de faciliter de façon générale l’innovation ascendante et la créativité. Déjà, c’est moins l’usine : les machines y sont plus modestes et la dimension reste humaine alors qu’un TechShop fait 1 500 m2.

Gros sous vs charte

Surtout, les fab labs s’appuient sur une charte où les valeurs de partage, d’ouverture, d’entraide et d’éducation sont fondamentaux. On y privilégie les formats ouverts, qu’il s’agisse du logiciel ou du matériel. Ce qui ne veut pas dire pour autant qu’on ne puisse pas y faire développer un produit pour développer derrière une activité, mais ce n’est pas le but final :

Secret : les concepts et les processus développés dans les fab labs doivent demeurer utilisables à titre individuel. En revanche, vous pouvez les protéger de la manière qui vous choisirez.

Business : des activités commerciales peuvent être incubées dans les fab labs, mais elles ne doivent pas faire obstacle à l’accès ouvert. Elles doivent se développer au-delà du lab plutôt qu’en son sein et de bénéficier à leur tour aux inventeurs, aux labs et aux réseaux qui ont contribué à leur succès.

En théorie, les fab labs sont ouverts et gratuits, dans la réalité, c’est parfois un mix des deux, car il faut bien financer l’endroit. Au Fac Lab, c’est totalement gratuit, mais trois formations autour des fab labs vont être proposées pour assurer des revenus en ces temps de disette de fonds publics.

Les différentes étapes de la fabrication de la sculpture en bois (inspiré d'une oeuvre de George W Hart) avec la découpe laser , en passant par le logiciel de modélisation 3D et la découpe de bois. Le 6 décembre 2012 au Fac Lab de Gennevilliers. (cc) Ophelia Noor

Nos deux intervenants ont souligné ces dimensions propres aux fab labs, explique Emmanuelle Roux, en particulier l’aspect éducatif :

J’ai insisté sur l’importance de permettre aux plus jeunes d’accéder à ce genre de lieu. Et il faut mailler tout le territoire, ne pas se cantonner à Paris.

Avis à Vincent Peillon, notre ministre de l’Education qui souhaite refonder l’école, chapitre 42. Aux États-Unis, une association comme School Factory essaye déjà depuis quelques années d’amener ce type de lieu dans l’école, pour favoriser l’apprentissage par le faire, en mode projet et dans une optique de partage des connaissances. Bref l’envers du système français actuel.

S’appuyer sur les EPN

Emmanuelle Roux a attiré l’attention sur les nombreuses structures publique déjà existantes, mairies, écoles et surtout EPN (espace public numérique), qui pourrait accompagner ce développement. Incubateur de fab lab, voilà une belle reconversion potentielle pour les EPN.

Apparemment, le message est passé : “Aymeril Hoang m’a dit qu’il en parlerait à la ministre, il a évoqué la possibilité de visiter le FacLab. Il souhaite aussi avancer la réflexion sur les EPN.” Owni est ravi, qui a sollicité le cabinet de Fleur Pellerin pour une table ronde sur le sujet le mois dernier, ainsi que celui de Montebourg, sans succès.

L’impression 3D vend son âme

L’impression 3D vend son âme

Le fabricant d'imprimante 3D grand public MakerBot incarnait la possibilité d'un business model basé sur l'open ...

Les préoccupations des industriels n’étaient pas forcément sur la même longueur d’onde. Non pas que ces représentants aient découvert le sujet : travaillant sur la R&D, ils étaient déjà bien sensibilisés. En revanche, les questions de propriété intellectuelle les préoccupent davantage. “Seb était inquiet à l’idée de se faire copier, je leur ai expliqué qu’ils ne pourront pas l’empêcher”.

L’exemple de MakerBot, qui a mis de l’eau propriétaire dans son vin open source, parce que des fonds ont mis gros dessus, n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd : pour faire du cash, il faut fermer les modèles ont compris certains dans un raccourci erroné. Les nouveaux outils ne servent à rien si les schémas mentaux et économiques sont toujours ceux du 20e siècle.

Si la Chine ou la Russie se sont déjà engagées dans des plans de subventions à ce type de lieux, tout reste à faire en France. Plus que les sommes mises sur le tapis, l’orientation qui sera choisie sera décisive, création d’euros ou de valeur sociale.

On attend avec impatience le positionnement d’Arnaud Montebourg, qui vantait la troisième révolution industrielle que les fabs labs sont censés porter. Qui sait, François Hollande annoncera peut-être lors de son grand rendez-vous avec la presse :

Moi, président, j’implanterai des fab labs sur toute la France.


Photos par Ophelia Noor. Réalisées au Fac Lab, le fab lab de l’Université de Cergy basé à Gennevilliers, le mercredi 5 décembre 2012.

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Ados et parents ne se parlent pas Net http://owni.fr/2012/11/21/ados-et-parents-ne-se-parlent-pas-net/ http://owni.fr/2012/11/21/ados-et-parents-ne-se-parlent-pas-net/#comments Wed, 21 Nov 2012 15:52:25 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=126380

Les enfants et adolescents ne communiquent pas avec leurs parents, enfin pas sur le numérique. C’est ce que constate Marie Derain, défenseure des enfants, qui a rendu son rapport hier, le 20 novembre. En substance, elle observe dans “Enfants et écrans : grandir dans le monde numérique” [PDF] une scission entre les utilisateurs (les plus jeunes) et les régulateurs familiaux (les parents la plupart du temps) :

Le contraste est frappant entre la vision méfiante, voire diabolisante, que peuvent avoir les adultes de l’usage du numérique par les adolescents, qui, eux, voient ces vecteurs de communication comme un élément banal de leur quotidien. [...] Les adolescents ne seraient pas conscients des risques de divulgation et de perte de contrôle de leurs informations personnelles. Pourtant, les jeunes adolescents ne sont pas si démunis. Au contraire, ils semblent agir en connaissance de cause, quitte à courir ces risques. [...] Les incertitudes et les angoisses, les interrogations sur son avenir se dissolvent dans un univers virtuel où il reprend la main, qu’il maîtrise via son avatar numérique. Aux confins du réel et du virtuel, du présent et du possible, c’est l’aventure sans risque, la prise de risque sans conséquence, l’expérimentation sans trace ni témoin, du moins l’adolescent veut-il le croire. L’exposition de la vie privée prend alors un autre sens.

La défenseure a conscience de l’ambivalence que peut représenter Internet pour les plus jeunes et elle précise que l’idée générale du rapport veut montrer qu’il est nécessaire de “rapprocher Internet de la famille”. En soulignant que :

Porteurs d’un potentiel d’enrichissement social et individuel encore mal évalué car évolutif, facteurs indéniables de lien social et de dépassement des barrières, ces médias qui s’avèrent aussi vecteurs de connaissances et d’éducation pour tous, ne sont pourtant pas sans risques pour les enfants.

Le manque de paroles

Selon le baromètre “Enfants et Internet” de 2011 de l’opération nationale de sensibilisation “Génération numérique”, 87% des 15-17 ans déclarent connaître les paramètres de confidentialité (ils sont 22% de cette tranche d’âge à ne pas protéger leurs informations personnelles sur les réseaux sociaux), contre 56% des 13-15 ans et 42% des 11-13 ans. Bien peu donc pour la défenseure au regard de ce que les enfants postent à droite et à gauche sur le web. Selon ce même baromètre, 20% des 15-17 ans, 28% des 13-15 ans et 22% des 11-13 ans parlent avec leur proche de leur utilisation du Net. Mais de quoi parlent-ils ? Du temps passé sur la Toile (55% des 8-17 ans selon une enquête de la TNS Sofres). Dans le temps de connexion, il n’y a pas de place à l’utilisation des réseaux et autres sites de partage, vecteurs de lien social — et par conséquent de dépôt de photos qu’on aimerait pas forcément retrouver distillées un peu partout.

Certes. Pour la défenseure :

Il convient de trouver le juste équilibre entre la prévention des risques et la limitation des possibilités.

Mais ce juste milieu aristotélicien pourrait être alors trouvé grâce à des programmes de régulation du Net ? Pas si l’on tient compte de la constitution même du réseau “difficile voire impossible à réguler”. Le seul moyen de réguler Internet n’est autre qu’une forme de discussion entre les acteurs, de l’internaute aux FAI et… de rendre possible — “afin de lutter contre les comportements qui viennent d’être évoqués [pédopornographique, ndlr]“ — le signalement plus rapide de ces comportements.

Formation des profs et des proches

Le dialogue à instaurer avec les acteurs de la socialisation des enfants (la famille et l’école) est l’une des solutions complémentaires à la répression ou la régulation, “difficile voire impossible” donc. Quand les classes sont abreuvées de matériel technologique alors même que les professeurs ne sont pas tous enclins à s’en servir, c’est une difficulté.

Assurer une formation effective aux TICE des principaux acteurs intervenant auprès des enfants (professeurs, éducateurs, animateurs…) — abordant aussi bien la sensibilisation aux risques, les informations sur les systèmes de protection, que l’accès à la culture et à la connaissance. Trop d’initiatives coûteuses voulant mettre en œuvre les ressources numériques à l’école, dans le monde de la culture, de la santé, des loisirs, achoppent faute d’une formation adaptée réellement dispensée aux intervenants, contribuant ainsi à une image de confusion et à la mauvaise utilisation de ces ressources pourtant considérables.

Collégien suréquipé édition limitée

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Le bon vieux dictionnaire comme cadeau à l'entrée au collège, c'est terminé : cette année les élèves de 6e du ...

Et si l’Éducation nationale semble prendre conscience progressivement de l’importance que revêt Internet aujourd’hui pour les enfants – et leurs parents – Marie Derain explique que “si les expériences locales foisonnent, l’impulsion institutionnelle est difficile à repérer”.

D’autant que ces dernières s’emmêlent et se renvoient la balle : les ordinateurs distribués aux élèves de sixième du Val-de-Marne seront gérés par des enseignants dont la formation devrait être assurée par… le rectorat. Soit l’académie de Créteil, distincte du Conseil Général du Val-de-Marne à l’origine du programme.

Pourtant, l’enthousiasme est là :

Partout en France, à partir d’engagement personnel des enseignants ou sous l’impulsion d’un recteur dynamique, les outils sont testés, les pédagogies qui s’appuient sur le numérique sont formalisées, faisant émerger quelques orientations.

À souhaiter que le relais soient pris par les enseignants, en complément des parents, pour permettre aux enfants d’appréhender le Net en évitant de vouloir à tout prix une régulation impossible. Pour aider à maitriser l’extimité des enfants ? Le droit à l’oubli numérique pour garantir “la paix et la cohésion sociale”.

Alex Türk, alors président de la Cnil, déclarait en 2009, dans le rapport d’activités, qu’il était “inacceptable et dangereux que l’information mise en ligne sur une personne ait vocation à demeurer fixe et intangible, alors que la nature humaine implique, précisément, que les individus changent, se contredisent, bref, évoluent tout naturellement”. Tout adolescent devenu adulte devrait pouvoir alors “obtenir la suppression de données personnelles qu’il a lui-même mises en ligne” selon ledit rapport. Parce que la diffusion de l’information “est large” mais aussi et surtout parce que

la vie “virtuelle” de l’enfant n’est désormais plus dissociable de sa vie “réelle”, elle en fait partie.

Préconiser l’oubli et l’effacement est une solution qui ne règlerait rien d’autre que l’absence de réflexion au moment de poster sur Facebook une photo à demi-nu. Le droit au déréférencement permettrait aussi “à la personne concernée de demander et d’obtenir la suppression du référencement des informations en question, dans les moteurs de recherche par exemple. Ainsi les données devenues indésirables disparaîtraient non seulement du site où elles ont été initialement introduites, mais aussi de tous les sites qui les ont reprises et diffusées” :

Intégrer le droit au déréférencement au règlement européen actuellement en préparation. Faire reconnaître aux mineurs le droit à une protection renforcée de leur vie privée — droit à l’oubli, droit au déréférencement. En janvier 2012, la Commission européenne a rendu publique une proposition de règlement européen, réformant le cadre de la protection des données personnelles, qui propose plusieurs avancées dans la protection des enfants. En effet, le droit actuel de la protection des données est limité en ce qui concerne les enfants.

Le droit à l’oubli, maille d’un nouvel arsenal juridico-legislatif pour encadrer et “protéger”. Et pallier, sans doute, l’absence ou la pauvreté du dialogue entre ceux qui éduquent et ceux qu’on veut éduquer. Reste à déterminer si les uns ne devraient pas, finalement, être éduqués avant les autres.


Illustration par Soosay [CC-by]

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L’enfance de l’art en dataviz http://owni.fr/2012/10/25/enfance-art-dataviz/ http://owni.fr/2012/10/25/enfance-art-dataviz/#comments Thu, 25 Oct 2012 15:20:34 +0000 Julien Joly http://owni.fr/?p=123958

Neuf heures. Une douzaine d’enfants déferle sur le stand du collectif Open Data de Rennes. Des tables bricolées à partir de palettes, style DIY, à l’occasion du festival Viva-Cités.

Notre mission : sensibiliser des écoliers à l’art de récolter les données et de les mettre en forme de différentes façons : diagramme circulaire, colonnes… Dans ma tête, ce n’est pas gagné d’avance. Comment intéresser des enfants à un concept aussi abstrait (et, accessoirement, paraître aussi cools que le stand d’à-côté, dédié aux imprimantes 3D et aux robots) ?

Pour essayer de capter l’attention des chérubins, on avait pris quelques précautions :

1. Dédramatiser

L’Open Data, c’est utile et rigolo. Voilà le message que doit faire passer Benoît, un membre du collectif promu M. Loyal pour l’occasion :

C’est quoi, des données ? Eh bien, c’est un peu comme dans une recette de cuisine. On va prendre de la farine, des œufs, et ça va faire un gâteau. Chacun de ces ingrédients est une donnée : on sait ce que c’est et combien il y en a. Les données, c’est important pour un pays par exemple. Comme savoir combien il y a de garçons et de filles, quel âge ils ont…

Quant à l’Open Data, c’est des données qu’on peut réutiliser. Vous savez ce que ça veut dire, “open”?

Un enfant : On dirait une marque de voiture !

Bon, au moins, ils écoutent sagement.

2. Diviser pour mieux datavizer

On installe les élèves par petits groupes de trois ou quatre. Chacun est accompagné par un membre du collectif qui les guide dans leur “exercice”. C’est aussi plus facile à gérer, d’autant que, parfois, les feutres ont tendance à se transformer en missiles lancés dans le pull du voisin.

Eh oui : pendant une heure, nous n’allons utiliser ni ordinateur, ni logiciel d’infographie : uniquement du papier des feutres… et des LEGO !

Chaque enfant commence par récolter et manipuler des informations. Mais pas n’importe quelles informations : des informations sur lui-même.

Nous leur avons distribué des grandes feuilles A3 avec des pictos et des cases à remplir : “Es-tu une fille ou un garçon ? Colorie la pastille correspondante avec la bonne couleur. Combien de télés il y a chez toi ? Combien d’animaux possèdes-tu ? De quelle espèce ?”

3. La dataviz sans ordinateur, c’est possible

Les enfants colorient le nombre de cases correspondant et reçoivent l’équivalent en briques de LEGO, qui seront par la suite récoltées dans chaque groupe puis assemblées pour faire des diagrammes en colonnes. Plus fort que la réalité augmentée.

L’atelier ne se déroule pas trop mal compte tenu du fait que les enfants ne connaissent pas les pourcentages et les fractions… alors, quand on leur demande de remplir un diagramme représentant la répartition des sexes dans leur petit groupe, on leur dit d’imaginer que c’est une tarte aux pommes.

Une fois le coloriage terminé, je leur indique les feuilles du groupe voisin :

Regarde, dans leur “tarte aux pommes”, il y a plus de vert que de orange… pourquoi, à ton avis ?

C’est parce qu’il y a plus de filles que chez nous !

C’est dans la poche. Les diagrammes de Venn, par contre, ont un peu de mal à passer… Même si, à notre grande surprise, certains enfants ont compris leur fonctionnement instinctivement.

4. Prévoir de la place pour les cas particuliers

Au final, nous aussi on apprend des choses. Par exemple, les cases “famille” ne sont pas assez nombreuses pour certains qui vivent à sept ou huit sous le même toit. Idem pour le nombre de télés : certains ont presque un écran dans chaque pièce !

A la fin de l’atelier, on récolte les briques de LEGO de tous les petits groupes et on les assemble par thèmes. Ainsi, les enfants peuvent comparer leurs données personnelles à celles de toute la classe. Ils se rendent compte que le petit bout d’information qui les concerne fait partie d’un ensemble, qu’on peut quantifier et comparer.

Par exemple, la “tour de LEGO” verte est plus grande que l’orange. Ca veut dire que les filles sont plus nombreuses. Certains garçons s”offusquent : “Oh non, c’est pas vrai ?” Eh oui, les gars, c’est aussi ça, la dataviz : briser les idées reçues et voir le monde (bon, en l’occurrence, la salle de classe) avec un oeil nouveau.

Alors, mission réussie ? Certes, en une matinée, nous n’avons pas formé une petite brigade de datajournalistes juniors. Il reste aux enfants à apprendre à manipuler des concepts essentiels comme les fractions, la géométrie… ce sera pour plus tard. D’ici là, l’Education nationale aura peut-être inscrit une épreuve de #dataviz au bac, qui sait ?

En attendant, ces écoliers ont prouvé que la collecte et la visualisation de données pouvaient être étudiées à l’école. De façon ludique. Et, pourquoi pas, associées à d’autres matières comme les maths ou la géo.

Alors que l’atelier se termine, un petit garçon me demande s’il peut emporter un souvenir.

Bien sûr, tu peux garder la feuille !

Bof, moi, je voulais les LEGO !


À lire aussi How GM is saving cash using Legos as a data viz tool.
Photos via Open Data Rennes/VivaCités par Christophe Simonato.
Mise à jour 26 octobre : un problème technique nous a fait initialement attribuer cet article à Sabine Blanc et non à son véritable auteur Julien Joly. Voici qui est réparé.

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La twittclasse vire au clash http://owni.fr/2012/10/19/la-twittclasse-vire-au-clash/ http://owni.fr/2012/10/19/la-twittclasse-vire-au-clash/#comments Fri, 19 Oct 2012 13:03:57 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=123042

Mise à jour du 23 octobre
Mise à jour du 26 octobre

En Haute-Savoie, la première twittclasse du département a dû fermer sa timeline fin septembre, peu de temps après son ouverture, un rétropédalage qui semble inédit.

Il existe actuellement plus de 200 twittclasses en France qui fonctionnent sans problème, en accord avec leur hiérarchie. Il est fini le temps des expérimentations audacieuses de la pugnace Laurence Juin, la première à avoir utilisé le site de micro-blogging Twitter dans un cadre pédagogique en France. Le Centre national de documentation pédagogique donne même la marche à suivre.

Un lien vers YouPorn ou des insultes auraient-ils atterri dessus ? Rien de tout cela. Dès le début, tout a été fait dans les règles, nous a expliqué Aurélie, la jeune institutrice de La Roche-sur-Foron à l’origine de l’initiative :

Pour préparer le terrain, j’ai pris contact avec ma conseillère pédagogique en juin, pour savoir à qui m’adresser et quel projet fournir. Je me suis aussi renseignée auprès de collègues ayant des twittclasses pour savoir la procédure qu’ils avaient suivie. Puis, nous avons attendu les recommandations du chargé TICE du recteur de mon académie. Après ce feu vert hiérarchique, la réponse de mon inspectrice de l’Éducation nationale (IEN) a vite été positive.

Hacker la pédagogie

Hacker la pédagogie

Les médias sociaux font l'objet de fréquents blocages dans les établissements scolaires. Pourtant, en eux-mêmes, ils ne ...

La procédure peut sembler lourde, mais la maison Éducation nationale fonctionne ainsi, a fortiori quand il s’agit d’Internet, souffre-douleur d’une partie du corps enseignant, lassé des copié-collé Wikipedia et fermé aux charmes des liens faibles de Facebook, ce pourvoyeur de cyber-harcèlement.  Les premiers pas sur le réseau social se font sans souci, en respectant bien des règles pour éviter des dérapages : les élèves ne possèdent pas le mot de passe – qui n’est pas la date de naissance d’Aurélie… -, ils ont pour l’instant accès au compte via un projecteur, et plus encore,“ils ne tweetaient quasiment jamais en temps réel par manque de matériel en classe, nous enregistrions tous les messages dans des documents OpenOffice, puis ils étaient copiés-collés dans Twitter”, souligne Aurélie. Difficile de contrôler davantage. Certains parents s’y mettent même puisque cinq élèves créent un compte dans la foulée, précise-t-elle.

Bug Facebook cache-crasse technique

Et puis patatras, l’expérience est suspendue :

J’ai reçu l’ordre de cesser temporairement de tweeter avec la classe, au prétexte initial du pseudo-bug Facebook, et en attendant un avis des services juridiques… du Rectorat.

Le même rectorat qui avait donné son accord peu avant. La suspension sera transformée en arrêt total, pour des questions de sécurité. Contactée, l’inspectrice de l’Éducation Marie-Françoise Casanova nous a expliqué :

Les serveurs de Twitter sont à l’extérieur et l’entreprise n’a pas de convention avec l’Éducation nationale. Le projet n’a pas été autorisé, il l’était au début. D’autres logiciels qui ne respectent pas les conventions de sécurité sont interdits, ça n’a rien à voir avec Twitter. J’avais juste donné un avis pédagogique, le projet était, est toujours intéressant. La sécurité est la seule raison.

Jusqu’à nouvel ordre, les twittclasses sont désormais interdites dans le département. Et le nouvel ordre, c’est donc des conditions de sécurité satisfaisantes. On en conclut que l’Éducation nationale devra héberger des serveurs de Twitter.

Internet, c’est le mal

Dans le petit milieu des professeurs qui <3 les Internets, la décision parait absurde. Stéphanie de Vanssay, contributrice d’Elab (laboratoire-éducation-numérique), s’emporte : “Je suis outrée de cette fermeture sous de faux prétextes, c’est emblématique de la défiance généralisée de la hiérarchie envers les enseignants et d’une grave méconnaissance de tout ce que peut apporter le web à notre enseignement et à nos élèves.”

François Meroth, le président de l’association des Amis et défenseurs de l’école publique (ADEP), basée en Haute-Savoie, y voit un “décalage entre le discours affiché, avec la volonté affirmée d’ouvrir l’école et les politiques locales fermées.” Le ministre de l’Éducation nationale Vincent Peillon vient en effet de remettre sa feuille de route quinquennale pour refonder l’école en 10 points. Et “L’école et les nouvelles technologies” occupent le 8erang :

Les nouvelles technologies devront être utilisées comme “un levier de changement, d’ouverture“. Pour réussir le déploiement de l’e-éducation, le président de la République a demandé que les établissements soient équipés des matériels, ressources et réseaux nécessaires.

Bisbilles microcosmiques

On comprend d’autant plus l’agacement de François Meroth en se penchant sur la presse locale. La sécurité n’a peut-être rien à voir là-dedans, mais plus des enjeux de pouvoir microcosmiques. Le Dauphiné libéré relate dans un article surtitré “la seule classe Twitter du département, qu’il devait visiter, a été suspendue” :

Pierre Frackowiak, pédagogue et toute une carrière passée au sein de l’Éducation nationale, était invité par l’association des Amis et défenseurs de l’école publique (ADEP) pour s’exprimer devant le public, vendredi à La Roche-sur-Foron. Avant cela, il devait rendre visite à la seule classe Twitter du département située dans la même ville. Il n’en a pas reçu l’autorisation.

Quoi qu’il en soit, Aurélie et ses petits élèves peuvent se consoler en lisant les messages de soutien sur Twitter, qui eux circulent librement :

MàJ mardi 23 octobre

Pour tenter de faire évoluer la situation, l’ADEP et e.l@b ont envoyé une lettre ouverte au recteur, signé par “les personnalités et mouvements syndicaux ou pédagogiques suivants : Education et Devenir; Prisme; La Ligue de l’Enseignement; SE-UNSA; SGEN-Cfdt; SGEN-Cfdt 74; SNUipp 74; CRAP-Cahiers pédagogiques; Pierre Frackowiak, (IEN honoraire); Michel Guillou, (consultant spécialiste en éducation numérique); Jean-Jacques Hazan, (président de la FCPE); Philippe Joutard, (ancien recteur); François Taddei, (généticien, membre du Haut Conseil de l’Education).”

Lettre qui sera envoyée si rien ne bouge ce jeudi “pour un écho aussi large que possible dans la presse”.

C’est la twitt-guerre.

MàJ mardi 26 octobre

Owni a reçu des nouvelles de cette affaire par l’intermédiaire de l’ADEP :

“L’affaire de la ‘Twitt-Classe’ se règle ce jour, sans que nous devions publier la ‘lettre ouverte’. Nous avions dit au Recteur que nous espérions une solution dans les 48 heures. C’est en cours, les choses s’étant accélérées de façon significative. Nous vous remercions de l’intérêt que [...] vous avez porté sur cette affaire qui était nettement moins anecdotique qu’il n’y semblait. Et les articles parus dans la presse et les réseaux locaux ou nationaux auront eu leur importance.

Dans un message pervenu aux signataires de la lettre, l’ADEP se félicite que “l’enseignante a[it] reçu ce jour une forte délégation “de luxe”, (IEN, DASEN, IANA…), pour un examen approfondi du projet” et que “la classe Twitter [puisse] redémarrer, moyennant quelques aménagements qui permettent à tout le monde de sortir avec les honneurs de cet imbroglio.


Photo de Mallix [CC-byncnd]

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Ce samedi, les enfants ont cours de hacking http://owni.fr/2012/10/12/ce-samedi-les-enfants-ont-cours-de-hacking-hackidemia-ecole/ http://owni.fr/2012/10/12/ce-samedi-les-enfants-ont-cours-de-hacking-hackidemia-ecole/#comments Fri, 12 Oct 2012 13:24:55 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=122104

Après une première édition à Paris en juin, HacKIDemia a bougé à Bucarest en Roumanie en septembre.

À l’HacKIDemia, on n’apprend pas aux enfants à cracker le code de l’ordinateur de leurs géniteurs, non, on leur enseigne les sciences et la technologie par la pratique, en vertu du learning by doing cher aux hackers, ces bidouilleurs créatifs. Ce samedi, dans le cadre de l’Open World Forum (OWF), la deuxième édition française, co-organisée avec La Cantine/Silicon Sentier, proposera plusieurs ateliers pour mettre les menottes dans le cambouis, et aussi les grandes mimines des parents : conception de jeux vidéo, introduction à l’électronique avec le processeur Arduino et de la soudure, robot, graffiti, etc.

Ne vous fiez pas au côté fric de l’OWF, vitrine annuelle de l’Open Source en France qui se tient du côté des Champs-Élysées. Comme se réjouit Clément, membre du hackerspace francilien l’Electrolab qui prête son concours, le but n’est pas de rester entre-soi :

Dès le départ, Stefania vise une diffusion très large, pas uniquement pour nos petites têtes bobo, elle s’organise avec des contributeurs d’un peu partout. À force de passer sa vie dans des avions, elle a des contacts très variés.

La Stefania-voyageuse en question, c’est une jeune pile (open source) déroulant dans un français impeccable son parcours qui l’a menée de sa Roumanie natale à voyager sur tout le globe pour son projet HacKIDemia, après un passage par la Singularity University de Google aux États-Unis.

Le premier HacKIDemia à Paris en juin dernier, avec des élèves de l'internat d'excellence à Marly-le-Roy (78).

Hacker la pédagogie

Hacker la pédagogie

Les médias sociaux font l'objet de fréquents blocages dans les établissements scolaires. Pourtant, en eux-mêmes, ils ne ...

Maman professeur, père ingénieur en électronique, cette mince petite brune prolixe a synthétisé dans son projet les ADN parentaux. Après un master en ingénierie pédagogique et un passage par Erasmus qui l’a rendu polyglotte — 7 langues en tout ! —, elle a atterri chez Google à Dublin pour plancher sur les algorithmes.

Plus que les opérations, elle se passionne pour l’éducation et initie des projets au sein de l’entreprise en Irlande, pour les adultes. Pas vraiment sur la même longueur d’onde que le géant de Moutain View, elle démissionne et, avec ses économies, part faire du volontariat au Cambodge, initier ce qui deviendra HacKIDemia. Avec une ligne claire :

Tu n’aides pas forcément les gens en leur donnant de l’argent. Le Cambodge est le pays avec le plus grand nombre d’ONG, ça handicape ce peuple  à un point pas possible. Je leur ai dit “je ne vais pas vous donner de l’argent, mais vous apprendre pour vous aider à vous en sortir par vous-même”.

Et un modèle, les hackerspaces, ces espaces physiques où les hackers se rencontrent, échangent, mutualisent :

Je veux faire des hackerspaces pour les enfants ! Il y a une innovation qui passe, invisible, mais qui a beaucoup d’impact, alors s’ils échangent avec les enfants…

Une bêta “magique”

Le numéro zéro d’Hackidemia est allumé en juin dernier, avec l’aide François Taddéi, du Centre de Recherche Interdisciplinaire, figure incontournable en France sur la réflexion pédagogique. Dans un lieu emblématique : l’internat d’excellence de Marly-le-Roy, une de ces structures destinées aux élèves défavorisées à fort potentiel. Une bêta qui tient toutes ses promesses. Stefania se souvient :

Les jeunes ne savaient pas trop à quoi s’attendre, ce sont des ados, l’âge où on les perd, ils sont venus en se demandant ce qu’ils allaient faire. À la fin c’était assez magique, on ne pouvait plus les faire partir : “j’ai fait un robot, j’ai fait un robot, il y avait une sorte de lumière dans leurs yeux.”

Benoit Parsy, qui fait des ateliers LEGO Mindstorm (des robots LEGO pour apprendre à coder, ndlr), est venu avec sa fille, elle a 6-7 ans et elle est très forte en programmation, ils ont accepté qu’elle leur apprenne et ils ont fait à leur tour.

Cela été très important pour nous : l’événement a été monté sans budget, nous avons juste contacté les gens qui travaillent avec des jeunes sur Paris, on a pu mesurer la motivation.

"J'ai fait un robot, j'ai fait un robot !"

La jeune femme enchaine avec un saut décisif par Google, non pas l’entreprise mais sa controversée Singularity University, en tant que education teaching fellow. L’institution vouée aux technologies, et non au transhumanisme comme on le croit à tort, se révèle surtout être une belle opportunité pour développer son projet, entre conférences et discussions interminables le soir.

De ce séjour, HacKIDemia en est ressorti avec un staff de trois personnes en plus pour faire des petits partout dans le monde, sur le mode du lab mobile.

Brésil, Niger, Mexique, Australie, Malaisie

Et depuis, ça n’arrête pas. Après Paris, les allumages s’enchaînent : installation d’un fab lab permanent à Sao Paulo au Brésil, à Lagos au Nigeria dans le cadre de Maker Faire Africa, une grande foire au DIY, puis Mexique, Australie et Malaisie en début d’année prochaine. Ils sont souvent sollicités par des structures publiques qui payent le voyage, par exemple au Brésil une école. La communauté visée, enfants mais aussi parents et professeurs, ne payent pas. Des entreprises de l’écosystème croissant du DIY apportent aussi des fonds, conscient de l’intérêt et de l’enjeu.

L’écosystème de demain

Aux côtés de fablab@school, fab lab truck, School Factory ou encore Maker Camp, Hackidemia fait en effet partie de ces projets qui entendent réinventer l’école pour mieux l’adapter au contexte actuel, marqués par de multiples crises : économique et écologique bien sûr mais aussi perte de sens, sentiment de dépossession lié à la disparition des savoir-faire. Ces structures sont aussi autant de terreaux pour que la bidouille d’un week-end deviennent le projet d’une vie et contribuent ainsi à régénérer le système en perdition. Stefania s’emballe :

Le retour à la production locale est un moyen de sortir de la crise, de rendre aux gens la liberté de s’entraider, il faut des hubs d’innovation qui vont s’agrandir et former un écosystème. Il faudrait revenir au système des guildes d’artisans.

Dès le plus jeune âge, il faut donc penser en mode “projet”, comme le souligne Jérôme Saint-Clair, du Graffiti Research Lab, un groupe consacré au renouveau de l’art urbain présent ce samedi :

Il est essentiel d’associer, non pas plus de pratique “téléguidée”, mais davantage de découverte et d’expérimentation afin de permettre aux enfants de chercher des solutions à des problématiques qui leur sont propres (par eux-mêmes ou à l’aide d’un prof ou mentor), de collaborer en partageant leurs connaissances et de développer des projets pensés par eux et pour eux, mariant plusieurs disciplines.

Dans cette nécessité de renouveler l’école, les acteurs extérieurs, agiles, du type HacKIDemia, sont peut-être les mieux à même de faire bouger les choses, comme l’analyse Clément :

Bien, sûr, on n’est pas près de poser un hackerspace/makerspace/fab lab dans chaque établissement scolaire, et il est à peu près aussi vital de proposer ce genre d’activités dans un cadre totalement hors du scolaire aussi pour une autre raison un peu dingue : pour plein de monde, l’école est une corvée… à laquelle tu n’as pas forcément envie d’associer ton action, pour ne pas te griller auprès du public visé.

Reste un enjeu de taille : éviter de finir comme Montessori, douillet nid à progéniture élitiste, mais envahir l’école en douceur.


HacKIDemia, dans le cadre de KIDEXPERIMENT à l’Open World Forum ce samedi, de 11 h 30 à 17 heures, gratuit, inscription recommandée.
Photos CC Flickr [by-nc-nd] PhOtOnQuAnTiQuE

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Les petits bidouilleurs en open source http://owni.fr/2012/09/28/petits-bidouilleurs-enfants-open-source/ http://owni.fr/2012/09/28/petits-bidouilleurs-enfants-open-source/#comments Fri, 28 Sep 2012 14:41:39 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=120874 Open Hardware Summit à New York sur les vertus éducatives de l'open source hardware. Des vertus éducatives dont l'école traditionnelle n'a pas encore pris toute la mesure.]]>

Atelier soudure au Chaos Communication Camp de Berlin, août 2011, (cc) Ophelia Noor

Joey et Sylvia sont des petits monstres. Des petits monstres de générosité, qui portent haut, du bout de leurs bras de 14 et 11 ans les valeurs de l’open source hardware. Pour eux, partager la recette de leurs créations avec d’autres enfants est naturel car cela ne présente que des avantages. Un credo qu’ils ont développé ce jeudi lors de leur conférence à l’Open Hardware Summit à New York, un grand meeting annuel réunissant les figures de proue de ce mouvement.

Vidéos pédagogiques

Le duo n’a pas fait dans les grands discours incantatoire mais s’est exprimé en connaissance de cause. Sur son site, baptisé “Look what’s Joey is making” (“regarder ce que Joey fait”), l’adolescent affiche son slogan :

Ne vous ennuyez pas, faites quelque chose !

On trouve sur sa page le mode de construction de son bouclier Arduino en forme de cube fait avec des LED et ses vidéos pédagogiques pour apprendre à se servir d’un oscilloscope ou bien encore le fonctionnement des LED.

En dépit de son jeune âge, Joey a déjà son (tout petit) business, incarnant en cela la figure américaine du maker, le self-made-man américain qui a fait construit son pays grâce à sa créativité et sa volonté Pour 15 dollars, il est possible d’acquérir son cube Arduino. Après, on ne soupçonnera pas le gamin de se payer des packs de 8°6 avec. Sa marotte, c’est plutôt d’assister à des Maker Faire, ces grandes foires à la bidouille organisée par le magazine américain Make et qui ont essaimé partout dans le monde. Magazine auquel il contribue.

Ses réalisations sont même parvenues aux oreilles de Barack Obama : le président américain a eu droit à une démonstration de son Extreme Marshmallow Cannon dans le cadre de la fête de la science organisé à la Maison Blanche, au cours duquel il a annoncé des fonds pour financer la formation des professeurs de sciences. Si le président est tenté de le faire, le guide est sur Make.

Sans attendre une impulsion d’en haut, Joey a commencé un club de science dans son école pour partager son savoir-faire avec les autres enfants.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

“Super-Awesome” Sylvia n’est pas en reste : pour la troisième année, elle fait une émission sur YouTube avec son père “TechNinja”, Sylvia’s Super-Awesome Maker Show. Pas d’atelier Barbie ou Hello Kitty DIY mais des tutoriels pour utiliser Arduino, le très populaire micro-contrôleur open source, construire des fusées ou faire de la couture. Le tout avec le label Make Magazine. Comme Joey, Maker Faire est son Disneyland, au point de crowdfunder, avec succès son voyage à l’édition new-yorkaise ce mois-ci.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Mitch Altman, apôtre de longue date de l’open hardware, transmetteur inlassable de son savoir-faire à des enfants (et leurs parents) dans des ateliers, détaille les atouts de ce process :

Quand l’open hardware est disponible, les gens vont apprendre grâce à lui. En particulier quand la documentation est écrite avec des visées pédagogiques en tête, comme par exemple toute celle de mes projets et de ceux d’Adafruit (une plate-forme communautaire de vente et de partage dédiée à l’électronique, ndlr).

J’ai souvent dirigé les gens vers ma documentation quand ils demandent comment apprendre sur les différents aspects des micro-contrôleurs. Et ils m’ont souvent répondu qu’ils appréciaient vraiment ma documentation bien écrite car elle les aide beaucoup à apprendre.

Beaucoup de projets open source ont des communautés d’utilisateurs (et même leur propre forum) avec des niveaux de compétence variés et qui s’entraident en ligne ou en personne. Cela est beaucoup plus difficile à réaliser quand des avocats de projets propriétaires veulent empêcher les gens d’apprendre à utiliser leur “propriété intellectuelle”(plutôt que de la partager).

Initiatives individuelles peu soutenues

Pourtant, l’école ne semble pas avoir pris la mesure du mouvement. Derrière leur côté “petits cracs du DIY coachés par leurs parents” qui peut agacer, Joey, Sylvia et d’autres, mettent en œuvre une vision de l’apprentissage que n’épouse pas forcément le système éducatif occidental, reflet d’une société façonnée par les logiques propriétaires. Lorsqu’on lui demande si son école encourage l’open hardware, Joey répond par la négative. L’adolescent qui affirme “ne pas être un grand fan de l’école” démontre pourtant que c’est une voie très fructueuse.

James Carlson, créateur de School factory, une association américaine qui développe des espaces éducatifs communautaires du type makerspace, renchérit :

Les écoles sont de plus en intéressées par l’open hardware mais elles sont en retard. De façon individuelle, des professeurs mettent en place des ateliers dans le domaine des STEM (Science, Technologie, Engineering et Math, ndlr) et apprennent aux enfants à créer en recourant à l’open hardware mais ils ne sont souvent pas soutenus. C’est nouveau et donc mal compris.

Une telle démarche surprend, à commencer par la maman même de Joey :

Il ne voulait faire que de l’open source. Il aime que, quoi que les gens fassent, tu puisses apprendre de leurs créations, et  compléter, c’est vraiment la meilleure façon d’apprendre. Je n’ai pas compris au début mais maintenant oui… c’est la seule façon d’avancer !

Le privé en renfort

Faute que l’école s’empare de l’opportunité, James souligne que des communautés et des associations se sont mises sur le créneau, comme les makerspaces/hackerspaces. La dernière génération est un terreau propice, qu’il faut cultiver :

Elle est davantage encline à partager ses idées. Je pense qu’elle réalise que nous profitons tous de plus d’ouverture et de collaboration.

En même temps, nous avons la responsabilité d’enseigner aux jeunes générations ce que la transparence et l’ouverture peut leur apporter, ainsi qu’à la société.

Parmi les initiatives dans ce sens, l’incontournable Make se montre très actif. Cet été, il a organisé un Maker camp, “un camp DIY virtuel” à l’attention des enfants qui ne partent pas en vacances. Le concept ? Chaque matin, une figure de l’open source hardware explique comment fabriquer un projet, donne ses petites astuces Le soir, ce “conseiller” revient avec les participants sur la réalisation du projet et peuvent montrer leurs photos. Parmi les intervenants, Joey, Limor “Ladyada” Fried, la fondatrice d’Adafruit, le CERN et Dale Dougherty en personne. Le tout avec le soutien de Google.


Photographie Ophelia Noor (Atelier soudure au Chaos Communication Camp de Berlin, août 2011.)

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Les profs Internet http://owni.fr/2012/09/18/les-profs-internet/ http://owni.fr/2012/09/18/les-profs-internet/#comments Tue, 18 Sep 2012 15:24:31 +0000 Thomas Saintourens http://owni.fr/?p=120356 Usbek & Rica, ce 18 septembre à la Gaité Lyrique à Paris, à l'occasion d'un nouveau Tribunal pour les générations futures. Pour nourrir cette réflexion, reportage chez les révolutionnaires de la pédagogie. ]]>

©Gwendal Le Scoul pour Usbek & Rica

Ce reportage est à retrouver dans le dossier « La revanche des cancres » à la Une du dernier numéro d’Usbek & Rica.

Au guidon d’un tricycle propulsé par un extincteur, Walter Lewin traverse l’amphithéâtre du MIT à toute allure en hurlant « Yihaaa ! ». Ses étudiants de physique – disons plutôt son public – se marrent et applaudissent. À la question rituelle « Quel est ton prof préféré ? », tous répondent mister Lewin, à Boston. La réponse serait la même à Dallas, Guingamp ou Hô Chi Minh-Ville : sur Internet, les cours de cet allumé à l’accent hollandais sont visionnés deux millions de fois chaque année. Pas besoin de frais d’inscription pour être un disciple de celui qui prône la nécessité «d’être un artiste pour motiver ses étudiants».

À 76 ans, Lewin représente une nouvelle génération d’enseignants, qui utilisent le « je » à tout bout de champ, gèrent leur image comme des vedettes de cinéma et font fructifier leurs talents de pédagogue bien au-delà de leur quota d’heures légal. Cette vogue vient d’Amérique, qui toujours chérit ses self-made men et sait apprécier les performances. Dans le jargon, on les appelle les trophy professors, ceux que les facs s’arrachent chaque été au terme de transferts dignes de la NBA.

À la maxime « Publish or perish », qui symbolise le souci vital des profs d’apposer leur nom dans les revues prestigieuses, un nouveau commandement est en passe d’apparaître : « Entertain ! »

Prime aux barjots

Aux côtés de l’inénarrable Lewin (il faut le voir, en tenue de safari, tirer au canon des balles de golf sur un faux singe pour expliquer la gravité) brille une constellation de profs stars, précurseurs d’une ère nouvelle où la matière, dopée au marketing personnel, devient marché de niche. Tel le philosophe américain Michael Sandel, dont le cours intitulé « Justice avec Michael Sandel » est un succès planétaire. Pas de plan en trois parties, mais une question, de laquelle découle un raisonnement richement argumenté : « Peut-on justifier la torture ? », « Combien vaut une vie humaine ? »… Son site annonce ses dates de tournée et propose une ribambelle de produits dérivés.

Moins profs que prophètes, ces hommes de spectacle savent monétiser leur charisme.

Je veux devenir le Lady Gaga de la finance !

C’est ce que clame Aswath Damodaran, 10 000 abonnés sur Twitter, des livres à la pelle, toujours bien placé aux baromètres des profs les plus influents (il exerce dans une demi-douzaine de facs à la fois). Son confrère Ron Clark, élu « Instituteur de l’année » aux Disney Awards 2001, fait son beurre au niveau élémentaire. Ses [PDF] « 55 règles » de vie en classe et sa pédagogie énergique, forgées dans des écoles publiques de Harlem, ont même eu l’honneur d’une sitcom avec Matthew Perry. Comme tout bon gourou en devenir, Clark a tôt fait de quitter l’Éducation nationale pour créer sa propre académie privée.

Ces deux ambitieux font figure de débutants comparés au prof le plus populaire de la planète. Celui qui a élevé le cours de maths au stade industriel. Salman Khan travaillait dans la finance quand sa petite cousine, fâchée avec l’arithmétique, lui demanda de l’aide sur messagerie instantanée. L’expérience fut si concluante qu’en quelques mois Sal s’est retrouvé à la tête de la plus grande école alternative (et dématérialisée) du monde. Plus de 60 millions d’élèves suivent ses chaînes thématiques gratuites, traduites dans plus d’une dizaine de langues. Et la Khan Academy attire désormais une nouvelle clientèle : des écoles publiques américaines qui n’hésitent pas à utiliser directement ses méthodes.

De vulgarisation à vulgarité, la frontière est poreuse. La nouvelle génération de profs cliquables joue parfois le show pour le show. Comme Charles Nesson, cybergourou senior basé à Harvard, qui milite pour l’utilisation du poker dans les méthodes d’apprentissage. Ou Bucky Roberts, un trentenaire à casquette – mais sans baccalauréat –, qui depuis sa chambre a lancé un tutoriel à l’imparable simplicité, baptisé « The New Boston ». Peut-être grisé par le succès, Bucky élargit son offre vers le bizarre : « Construire un kart », « Jouer au backgammon » ou « Survivre en milieu sauvage ».

En comparaison, le marché français est encore en voie de développement. Mais nos vedettes nationales, qui savent drainer un public d’âge mûr, ont compris la nécessité d’élargir leur gamme sans renier les fondamentaux. Au rayon philosophie, Michel Onfray joue toujours à guichets fermés au théâtre d’Hérouville-Saint-Clair. L’hédoniste normand est une PME à lui tout seul, écoulant 300 000 exemplaires de son Traité d’athéologie et 400 000 CD de sa Contre-histoire de la philosophie. La crise spirituelle a du bon. Celle de la finance mondiale aussi. L’anthropologue belge Paul Jorion, estampillé Nostradamus de la crise financière, est devenu le chouchou des internautes. Ce barbu, ancien trader, se rémunère notamment au moyen d’une fenêtre de dons PayPal glissée à côté des billets de son blog.

La guerre des profs

Faire émerger les profs phénomènes constitue une démarche économique rationnelle. Selon une étude publiée en janvier 2012, si chaque élève de primaire croisait au cours d’une année de son cursus un professeur excellent (à « haute valeur ajoutée »), le PIB du pays pourrait augmenter à terme de 2 %. Alors, imaginons un peu : à quoi ressemblerait l’école de demain, quand les showmen auront pris le pouvoir ?

À une course au plaisir d’apprendre, d’abord. Des programmes saucissonnés en clips vidéo, pensés pour maximiser l’attention cérébrale. Une bourse mondiale de la popularité des super profs, indexée sur les « j’aime » de leurs fans ou l’évolution des abonnements, ferait vaciller leur hit-parade officiel. Certains gonfleront leur potentiel de prophète au moyen d’entraînements intensifs. D’autres utiliseront leur capital charismatique pour une reconversion holographique en 3D : cours d’EPS avec l’avatar de Roger Federer ou tutoriel de création d’entreprise avec celui de Mark Zuckerberg.

Ce Far West académique constituera un terrain de choix pour la bataille des paradigmes. La figure de l’enseignant glissera vers celle de militant, de lobbyiste. De l’histoire à la biologie, un vernis politique pourrait bien décorer la leçon du jour, surtout s’il s’agit d’aborder les origines de l’humanité. L’affrontement entre créationnistes et évolutionnistes échappera à tout contrôle dans le monde sans pitié des donneurs de leçons. Le pouvoir unifiant de l’école, avec ses programmes établis par consensus, volera en éclat. Chacun pourra prêcher sa vérité, flatter les élèves jusqu’à ce qu’ils se transforment en partisans. L’école deviendra club. Et tous les coups seront permis pour déstabiliser la concurrence. Sabotage académique, drague intellectuelle, dumping commercial : la guerre des paroles légitimes est déjà prête à éclater dans la jungle pédagogique actuelle.

Rien d’inédit toutefois. Cet horizon probable n’est pas sans rappeler la bonne vieille Grèce antique, quand on suivait, ébahis par leur talent, buvant leurs paroles, les Socrate et autres Aristote sous les pins parasols de la mer Égée. Ou, plus près de nous, la mode des profs stars des années 1960, quand Althusser ou Foucault faisaient salle comble, à Normale sup et au Collège de France. Sauf qu’aujourd’hui, et plus encore demain, c’est au nombre de clics que se mesurerait leur incroyable popularité. Être prof a toujours été, et sera toujours, affaire de séduction.


Illustrations par Gwendal Le Scoul pour Usbek & Rica.
Direction artistique et couverture du magazine par Almasty

Retrouvez en kiosque le nouveau numéro d’Usbek & Rica

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Dans le berceau du hacking http://owni.fr/2012/08/29/dans-le-berceau-du-hacking-hackermoms/ http://owni.fr/2012/08/29/dans-le-berceau-du-hacking-hackermoms/#comments Wed, 29 Aug 2012 13:28:04 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=118076

Crèche, nom féminin, XXe siècle : lieu d’accueil pour enfants, âgés de deux ou trois mois jusqu’à 3 ou 4 ans dans un cadre spécialement conçu pour les tout-petits. [Source Wikipedia]

Mothership HackerMoms, nom masculin, XXIe siècle : hackerspace-crèche accueillant des mamans ET leurs enfants. Elles peuvent s’adonner à la bidouille créative au son des gazouillis des marmots. [Source Owni]

Créée en 2011 en Californie, Mothership HackerMoms (MSHM) n’a pas déquivalent. Sho Sho Smith revient sur ses origines, dans un contexte douloureux :

J’ai commencé HackerMoms l’année dernière quand mon mari était soigné pour un cancer et que je venais d’accoucher de mon second enfant. De la même façon que les cataclysmes provoquent des changements, la maladie a amené la nécessité d’un espace séparé. J’avais besoin d’un projet positif qui joignait créativité et maternité, deux parts fondamentales de mon existence, dans une épreuve qui me dépassait, si bien que je ne me suis pas perdue moi-même. C’était en quelque sorte une manière de prendre soin de moi. HackerMoms a sauvé ma vie et, par extension, celle de ma famille.

Sortir de l’isolement

De ce point de départ très particulier est sortie une communauté qui rend service et pas qu’aux mamans en détresse, comme l’explique la jeune femme :

Je pense que, nous les mamans, avons besoin de nous amuser plus dans nos vies pour contre-balancer les injonctions à être une parfaite mère moderne. La vie avec de jeunes enfants peut isoler et être fragmentée. La garde d’enfants est une barrière importante. MSHM intègre le baby-sitting dans notre processus créatif en nous procurant le temps et le lieu pour travailler.

Traditionnellement, les groupes de mamans tendent à tourner autour des enfants. Nous sommes ici pour d’abord aider la mère, son identité en tant que créatrice puissante, exploratrice, entrepreneur, l’artiste de sa vie et de sa vie de famille.

De quoi rassurer la grand-mère de Samantha, une des co-fondatrices :

Ma grand-mère dit qu’elle se sent un peu désolée pour les mamans d’aujourd’hui. Elles ont tant de créativité et d’accès à l’information mais pas le temps d’en profiter, ni la confirmation du sens que cela apporte à leur et à celle de leurs enfants.

À gauche, le logo de MSHM ; à droite la couverture du premier Ms., un magazine féministe américain lancé en 1972. La similitude, involontaire, a ravi.

Du code à la restauration de meubles

À l’image de son chouette logo, qui représente une maman shiva stylisée brandissant perceuse, appareil photo, ordinateur, pinceau et bébé bien sûr, les activités dépassent les clichés hommes-femmes. Bien sûr, il y a un tropisme revendiqué autour des enfants, cœur du projet oblige, mais on est loin d’un groupe de tricot-cuisine : ateliers pour fabriquer des jeux d’extérieur, une porte de sécurité à partir de palettes de bois, reliure, club de maths, sessions de programmation, ces dernières sous la houlette de Lisha, qui, à 40 ans, affiche 19 ans de ligne de code, des enfants et un même un petit-fils. Au passage, on est loin aussi du hacking pur et dur : le concept en lui-même est peut-être le projet qui relève le plus du hacking, en détournant la finalité première des crèches.

Des projets commerciaux sont aussi développés et certaines mamans utilisent l’espace pour leur activité. Un groupe de travail collectif destiné à leur élaboration pour MSHM  se réunit. Samantha détaille :

Nous avons dessiné collectivement des tee-shirts uniques, des vêtements pour enfants, et nous développons en ce moment d’autres produits basés sur l’idée d’upcycling [faire du neuf avec de l'ancien en bon français, ndlr].

De tels lieux pourraient tout à fait contribuer à la revitalisation économique grâce à des frais généraux peu élevés les inventeurs et les makers, et ajouter une quantité de produits uniques et utiles à ce qui existe déjà, ce qui ce à quoi les gens aspirent aujourd’hui. De plus, c’est fabriqué localement. Cela soutient donc le revenu de la communauté et maintient les prix bas, ce qui permet aux gens d’acheter.

Après neuf mois vagabonds, MSHM s’est justement fixé en avril dans une zone en récession économique, entre Oakland et Berkeley. Si les premières membres étaient plutôt issues de la classe moyenne/supérieure, l’endroit apporte un nouveau flux de visiteurs. Car gare au cliché de la maman-bobo-hacker. “Nous avons une variété de professions : artistes, écrivains, graphistes, programmeurs, éducatrices, animatrices, etc, égrène Samantha. Notre groupe a fait du réseautage professionnel avec des organisations qui ont les mêmes centres d’intérêt que nous. Bien que certaines mamans travaillent à temps plein toute la journée,  beaucoup ont choisi des emplois du temps souples qui s’accommode avec des vies créatives en free lance et la maternité.” Elles sont maintenant une vingtaine de membres, sans compter les visiteuses qui viennent le temps d’un atelier.

“Fem-mom-ists”

HackerMoms est un incitateur aussi puissant que des allocations à faire des enfants, pour toutes celles qui redoutent de faire une croix sur une vie active riche. C’est aussi un moyen de faire faire des économie à la Sécurité sociale : retaper des meubles avec des copines est plus efficace qu’une plaquette de Prozac : “Si nous ne soutenons pas ce moi créatif et joueur, analyse Sho Sho, nous risquons le burn-out, la dépression et  des crises de nerfs à deux ans”. Pour Samantha, MSHM “fait venir les villages aux femmes”, offrant une “opportunité de plus de modeler un mode de vie équilibré et sain, pouvoir prendre une pause mentale, le temps de concentrer sur soi-même. J’ai vu les bénéfices incroyables pour les femmes et leurs enfants aussi.”

Les hackermoms à San Fransisco - photo par Caitlin O'Brien ©

Si les mamans s’activent beaucoup, les petits font aussi partie intégrante du processus créatif, comme le souligne leur présentation. MSHM n’est pas un endroit où l’on  s’en débarrasse dans un parc à l’écart, pendant que les adultes bricolent :

Parce que nos enfants apprennent en nous regardant, nous fournissons des gardes d’enfants sur place pendant nos rencontres.

Cacher ce téton que les hommes ne sauraient voir

On a beaucoup parlé des mamans, pas des papas. Entre autres pour une ridicule histoire de pudibonderie. Aux États-Unis, on ne plaisante pas avec le téton. Ce serait drôle si cela ne contribuait encore plus à éloigner les hommes de notre hacker-crèche, comme le déplore Lisha :

Les hommes sont définitivement autorisés ! Simplement ils ne nous ont pas encore rejoints. Tu vas peut-être dire que nous souffrons du problème des genres, inversé, en partie parce que Mothership HackerMoms est construit autour des besoins des mamans. Nous parlons d’un petit espace rempli de mères, de bébés et d’enfants, et il y a beaucoup de poitrines nues et de couches et autres qui rendent certaines personnes prudes.

Aux États-Unis, l’allaitement est un sujet de controverse bizarre et s’il y a bien quelque chose qui ne rend PERSONNE timide parmi nous, c’est l’allaitement. Cela suffit pour que certains aient le sentiment que MSHM n’est pas leur hackerspace. Et je le comprends.

Pour moquer cette phobie du sein, les mamans ont fabriqué des cache-seins en tricot pour les femmes qui allaitent. Féministe, oui bien sûr, le projet l’est, mais la majorité des femmes le sont aujourd’hui. Pour mieux le définir, elles ont inventé un néologisme, “fem-mom-ists”, “car les mères portent la plus grosse part socialement, économiquement et émotionnellement quand elles ont des enfants”, détaille Samantha.

Apprendre dans un hackerspace

Hackons l’école !

Hackons l’école !

À l'occasion de la rentrée, OWNI hacke l'Education nationale. Pour se préparer au monde de demain, une autre pédagogie ...

Un milieu hacker qui a contrario reste majoritairement masculin. Une petite étude de 2011 montrait que les hommes représentaient 90% des effectifs des hackerspaces. Et qui a trainé un peu dans ces lieux ne remettra pas ce chiffre, même empirique, en doute.

Si une partie des membres fréquentaient déjà le milieu, à l’image de Sho Sho dont le frère a participé à la création du Tokyo Hackerspace, elles étaient l’exception. Il était temps d’inverser la vapeur, se réjouit Lisha :

“HackerMoms a aussi réussi à mettre en lumière le rôle des femmes dans la communauté hacker. Cela a créé des controverses, bien sûr. Certains avaient le sentiment que les femmes n’étaient en aucune façon exclues avant, ou que cet espace excluait les hommes de façon injuste en se concentrant sur les besoins des mamans. Ce qui est génial, c’est que les gens ONT cette discussion.”

HackerMoms est aussi un exemple de plus des liens fructueux entre éducation et hacker. Des liens qu’il n’est pas toujours facile de tisser pour des questions de sécurité. Certains hackerspaces/makerspaces acceptent les enfants, et des projets scolaires se développent même autour de telles structures. Mais d’autres refusent pour éviter de se retrouver aux urgences avec un bambin passé à la découpe-laser.

Demandes du monde entier

Utile en diable, Mothership HackerMoms n’a pourtant pas attiré l’attention des politiques, alors qu’on en parle… jusqu’en France. La multiplication d’avatars passera sans doutes par la force enthousiaste de la base, qui les contacte de par le monde entier :

J’ai commencé à parler avec le représentant d’un centre communautaire à Seattle d’un projet de hackerspace family-friendly dans leur structure. Ils ont déjà un programme du type Maker Scout, intitulé “Big Brained Super Heroes Club”, et ils veulent voir les bénéfices d’un endroit, d’outils et de connaissances partagés des hackerspaces, mis à disposition de leur communauté pauvre, essentiellement immigrée.

Potentiellement, il pourrait y avoir Seattle HackerMoms, Palo Alto HackerMoms, Tokyo HackerMoms, Glasgow HackerMoms…, qui sait ?


Photographies via Mothership HackerMoms et Caitlin O’Brien ©tous droits réservés

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Le code, c’est chic, c’est fric http://owni.fr/2012/06/21/le-code-cest-chic-cest-fric/ http://owni.fr/2012/06/21/le-code-cest-chic-cest-fric/#comments Thu, 21 Jun 2012 10:06:42 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=114047

code, code, code, pendant le hackathon de voxe.org - (cc) Ophelia Noor pour Owni

10 millions de dollars : moins d’un an après son lancement en août 2011, Codeacademy vient d’effectuer une belle levée de fond. Ce site d’apprentissage interactif de la programmation avait déjà réuni 2,5 millions de dollars lors du précédent tour de table en novembre dernier.

Parmi les investisseurs successifs, on trouve quelques noms sexy dans le petit monde des start-ups des nouvelles technologies : Union Square Ventures, qui a mis de l’argent entre autres dans Foursquare, Tumblr ou bien encore Twitter ; Index Ventures, qui compte dans son portefeuille Skype, SoundCloud, MySQL, etc ; Kleiner Perkins, qui a mis des billes dans Spotify, Klout, Zynga… ;  Richard Branson, le fondateur de Virgin.

Un tableau de chasse à l’image de l’engouement que suscite l’apprentissage du code, en particulier aux États-Unis. Le “programmer ou être programmé” de l’écrivain américain Douglas Rushkoff semble avoir fait tilt dans plus d’une tête. La courbe de croissance de Codeacademy est affolante, à tel point qu’elle se définit maintenant comme “une entreprise mondiale” ayant atteint le saint Graal de la scalability , l’extensibilité en bon français : des centaines de milliers d’utilisateurs, 50% de leur audience hors des États-Unis, 400 cours, le tout assuré par neuf employés. Et ce n’est que le début donc.

Facile.

Storytelling

En bons adeptes du storytelling, les deux (très) jeunes fondateurs Zach Simms et Ryan Bubinski expliquent avoir fondé Codeacademy pour pallier un manque en matière d’éducation :

J’enseignais moi-même la programmation et j’étais extrêmement frustré de ce que je trouvais dans les livres, les vidéos et partout ailleurs en ligne. Dans le même temps, Ryan avait déjà enseigné à des centaines d’étudiants alors que nous étions à Columbia et que nous cherchions comment enseigner à des millions en plus. [...]

Mary Meeker de Kleiner Perkins a visité nos bureaux [au début de l'année]  et a décrit un panorama des quelques industries qui avaient besoin d’être secouées, l’éducation figurait en tête. [...] Nous avons passé beaucoup de temps à parler à Saul et Mary, et Mike Abbott chez Kleiner du futur de l’éducation, de la programmation et de nos forces de travail.

Il est vrai que l’école a du mal à prendre en charge cette partie et les appels à ce qu’elle intègre l’enseignement du code dans les programmes sont récurrents : Eric Schmidt, le président exécutif de Google, a ainsi taclé la Grande-Bretagne, le pays qui a inventé l’ordinateur, pour avoir “gaspillé son fantastique héritage en informatique”.

Si des initiatives similaires existent, comme CodeSchool, O’Reilly ou WebMaker et les Summer Code Party de la fondation Mozilla, aucune ne revendique un succès aussi fort. Mathieu Nebra, qui a fondé à treize ans en 1999 le Site du zéro, un alter ego français à succès, puis une société autour, émet des hypothèses :

Ils ont été très médiatisés, pourquoi ? Je ne sais pas… C’est un concept ancien, qu’ils ont réussi à simplifier et à rendre sexy.

Sexy et gratuit, ce qui aide. Si sexy que le maire de New York Michael Bloomberg a twitté qu’il allait s’y mettre aussi cet hiver, assurant au passage un beau coup de publicité gratuite :

Le #codeyear du tweet est une référence à l’opération lancée en janvier par la jeune entreprise, qui alimente ainsi son propre succès. Dans sa veine éditoriale, Code Year délivre un discours démystifiant sur le code, que certains imaginent comme un monde mystérieux et ésotérique et élitiste (un discours entretenus par certains programmeurs jaloux de leur pré-carré :)

Code Year est un cours introductif pour quiconque souhaite apprendre à programmer. Code Year commence avec les fondamentaux et enseigne les concepts à travers des cas concrets.

make($) sinon end(game)

Il y a juste un truc qui cloche, comme le souligne Mathieu Nebra :

Le montant de la levée de fonds ne m’étonne pas, aux États-Unis, il faut toujours rajouter un zéro. Mais la boite n’a aucune source de revenus. Ils pourront valoriser la base de leurs utilisateurs pour en faire une CVthèque ou faire payer les fonctionnalités. Mais leur communauté risque de ne pas être stable, comme elle s’est construite sur une hype.

Levée de fonds, succès foudroyant, jeunes fondateurs, buzz, Codeacademy a des parfums de micro-bulle. Si elle dispose d’un petit matelas de billets qui lui permet d’envisager le court terme sereinement , l’équation à long terme est inévitable : make($) sinon end(game) // just a copy/paste from myspace’s source.


Photo par Ophelia Noor pour Owni pendant la session hackathon d’applications organisée par l’association Voxe.org pour la présidentielle 2012

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Objectif électeurs #2 http://owni.fr/2012/04/15/objectif-electeurs-2-elections-presidentielle-photojournalisme/ http://owni.fr/2012/04/15/objectif-electeurs-2-elections-presidentielle-photojournalisme/#comments Sun, 15 Apr 2012 12:37:47 +0000 Ophelia Noor http://owni.fr/?p=106053 21 voix pour 2012, ce sont 21 photojournalistes partis à la rencontre de 21 électeurs aux quatre coins de la France. Une série de portraits qui vise à témoigner des préoccupations et des attentes de citoyens à quelques semaines des élections présidentielles.
Objectif électeurs

Objectif électeurs

OWNI est partenaire du projet 21 voix pour 2012, soit 21 portraits d'électeurs par des photojournalistes, autour ...

Prendre le pouls des électeurs, dans leur diversité politique, sociale, économique. Certains se prononcent pour un candidat, d’autres hésitent ou choisissent de voter blanc.

Les personnes ont été choisies en fonction des thématiques qui traversent les débats de la présidentielle, 21 en tout, – chômage, réforme de la retraite, immigration, agriculture, décroissance, éducation, etc. – Chaque photojournaliste a choisi un électeur en fonction de la thématique qui les intéressait ou en fonction des contraintes du projet (respect de la parité, diversité et thèmes et des catégories socio-professionnelles). Puis le réseau de leurs contacts a fait le reste.

Le deuxième volet de ces 21 P.O.M (Petites Œuvres Multimédia) part à la rencontre de Fabienne, enseignante à ESMOD et déçue du sarkozysme, par le photographe Benjamin Leterrier. Et de Delphine, jeune diplômée à la recherche d’un emploi, par la photographe Karin Crona. Nous vous donnons rendez-vous le 19 avril à La Cantine pour une soirée de projections et de débat autour de la représentation et la perception du politique dans les médias.

Karin Crona : le chômage

Delphine au Secours catholique. Elle y est bénévole sur son temps libre. ©Karin Crona/21voixpour2012

Karin Crona, a rencontré Delphine à un moment de ras le bol dans sa recherche d’emploi. Elle enchaînait les stages sans jamais trouver de CDD ou de CDI depuis plus d’un an. “Ce qui m’a frappé c’est sa volonté de ne pas rester inactive, de ne pas baisser les bras. Elle attendait une réponse pour un CDD quand je l’ai rencontrée mais elle était prête à reprendre un stage si cela ne marchait pas” raconte Karin.

Delphine donne du temps au Secours catholique, franchit de portes et enchaîne les entretiens. Karin ajoute,“au début de sa vie professionnelle, on a envie de s’investir et on ne s’attend pas à la commencer avec du chômage ou des stages à n’en plus finir. J’espérais pouvoir montrer ce cheminement, dans la recherche d’un emploi”.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Un si long chemin…

Delphine habite un immeuble élégant dans le 17eme arrondissement de Paris. Je l’ai vu deux fois chez elle. Pour accéder à sa chambre de bonne, il faut franchir beaucoup de portes, traverser la cour de l’immeuble jusqu’au fond, prendre les escaliers de service jusqu’au 7ème étage à pied et longer des couloirs. Ces escaliers sont étroits et vides. On se sent seul dans l’ascension, sans présence de voisins, avec sonnettes et paillassons. Pour moi, tout ce trajet était devenu symbolique du chemin qu’elle a du parcourir pour trouver du travail.

Delphine, jeune diplômée à la recherche d'un emploi par ©Karin Crona/21 voix pour 2012

Au départ, je voulais faire une séquence de stop motion où elle marche dans ce long couloir. Je lui ai demandé de se placer, et j’ai fait les photos. J’aimais bien cette lumière qui sortait derrière elle, au bout de ce long tunnel. Ce n’est qu’au moment du montage, que cette photo ma frappée, avec toute la symbolique qui s’en dégageait. Je trouvais qu’elle sortait du lot, qu’elle cristallisait son histoire et je l’ai gardée telle quelle.

Benjamin Leterrier : éducation et emploi

“Notre démarche sur le projet 21 voix pour 2012 était de respecter entre autres choses, la parité. À un moment donné, nous avions 5 femmes représentée pour 16 hommes. C’est cette contrainte qui m’a fait découvrir l’univers de la mode et m’intéresser de plus près aux enjeux de l’éducation et de l’emploi des jeunes,” raconte Benjamin Leterrier. Il rencontre Fabienne, professeur de stylisme à l’Ecole supérieure des arts et techniques de la mode (ESMOD).

Les élèves de l'école ESMOD au travail © Benjamin Leterrier/21 voix pour 2012

Déçue des promesses faites par le gouvernement Sarkozy, c’est son rapport avec ses élèves, son inquiétude et son sens de la responsabilité face à leur avenir qui a frappé Benjamin Leterrier. “On voit qu’elle est proche d’eux, qu’elle se sent responsable, et en opposition, elle ressent très fortement l’éloignement des hommes politiques des citoyens.”

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Transmission

C’était en fin d’après-midi. Les élèves ont tous un projet personnel de collection de vêtements à réaliser sur plusieurs mois. Ce jour là, ils passaient voir Fabienne avec leurs ébauches. ESMOD accueille beaucoup d’élèves des pays asiatiques et Fabienne donne aussi ses cours en anglais. Son parcours personnel est intéressant car elle a étudié dans cette même école, puis a travaillé dix ans en Chine dans une usine de textile avant de revenir travailler ici.

Fabienne et son élève © Benjamin Leterrier/21 voix pour 2012

Toutes les deux étaient très concentrées comme dans une bulle. Autour d’elles il y avait plusieurs élèves dans une grande salle. Je me suis placé comme une petite souris derrières elles. C’est ce moment de proximité, de transmission et d’attention que je voulais capter.


Photographies par Karin Crona © etBenjamin Leterrier © tous droits réservés

OWNI s’associe à au projet 21 voix pour 2012 avec La CantineSilicon Maniacs, Youphil, L’Atelier des médias, l’EMI-CFD et le Studio Hans Lucas. Nous vous donnons rendez-vous le 19 avril à La Cantine pour une soirée de projections et de débat autour de la représentation et la perception du politique dans les médias. Inscrivez-vous !

Les photojournalistes :

Karin Crona a 43 ans et vit en France depuis 12 ans. Graphiste de métier, dans l’édition et dans la presse, elle décide de faire de la photographie son métier principal depuis 5 ans. C’est le partage de ses clichés sur internet qui la pousse à se lancer. Elle traite des thèmes sociaux, liés à l’éducation, la précarité et l’exclusion.

Benjamin Leterrier a 38 ans. Biologiste et journaliste de formation, il découvre la photographie en 2001 lorsqu’il part s’installer à la Réunion. Il commencera à collaborer avec la revue du CNRS en avril 2012.

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