OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 “Il n’y a pas besoin d’être un banquier pour créer de l’argent” http://owni.fr/2011/06/16/pas-besoin-detre-un-banquier-pour-creer-de-largent/ http://owni.fr/2011/06/16/pas-besoin-detre-un-banquier-pour-creer-de-largent/#comments Thu, 16 Jun 2011 06:26:15 +0000 Stanislas Jourdan http://owni.fr/?p=67963 Bitcoin est une monnaie virtuelle créée en 2009 par Satoshi Nakamoto, un personnage mystérieux dont personne ne connait la véritable identité. Ce dernier, empruntant de vieilles idées issues des années 90, publia un document (pdf) décrivant les caractéristiques d’une monnaie décentralisée. Depuis peu, cette idée est portée par un bon  nombre de geeks pour changer notre système économique. Le blogueur Étienne Hayem (aka @zoupic) nous donne sa vision sur cette monnaie virtuelle à la mode.

Que t’inspire Bitcoin ?

Bitcoin est avant tout une initiative qui fait réfléchir. Comme l’a dit Rick Falkvinge (le fondateur du Parti pirate suédois, ndlr), c’est le Napster de la banque, le phénomène qui va ouvrir le débat sur un sujet qui était jusque-là en marge de la société : « et si c’était possible ? Et si on pouvait refaire la banque ? »

D’où sort Bitcoin ?

C’est apparu en 2009, à l’initiative de Satushi Nakamoto, ce pseudo japonais [personne ne connaît sa véritable identité, ndlr]. Avant lui, plusieurs personnes ont théorisé le concept, de manière prospective, pour essayer d’imaginer à quoi pourrait ressembler une telle monnaie.

Rien n’empêche de penser que l’on puisse créer une monnaie sur Internet dans le cadre d’une communauté, par exemple avec tous les utilisateurs des auberges de jeunesse. Mais ce genre d’initiatives restait connecté à l’économie réelle.

Alors qu’avec Bitcoin, la masse monétaire est complètement déconnectée avec un processus purement algorithmique, sur le modèle de Google. C’était envisageable, mais il fallait quand même le faire !

Donc beaucoup de gens y pensaient ?

Oui, mais c’est une vision qui est, pour moi, assez étriquée de la monnaie. Toute la force déployée pour prouver que c’est viable – ou en tout cas faire croire que c’est viable ou stable – est justifiée par la techno. C’est tout le concept de cryptocurrency : plus il y a d’utilisateurs qui font tourner le logiciel, plus les données sont cryptées, et plus il faut d’ordinateurs hostiles pour faire tomber le système.

C’est comme WikiLeaks, Wikipedia ou même Seti@home qui utilise le CPU (le processeur, ndlr) des gens quand leur ordinateur est en veille pour contribuer à la recherche d’ovnis… Là c’est pareil, on utilise l’ordinateur des gens pour crypter du code au maximum pour que personne ne puisse le casser. Plus il y a d’utilisateurs qui utilisent le logiciel, plus le réseau est complexe, donc sécurisé. Et les gens de Bitcoin disent que cette sécurité crée de la valeur.

« Code is law » en quelque sorte ?

Oui c’est ça ! Mais c’est là où c’est tordu… Car en fait, il n’y a pas besoin que tout soit indéchiffrable pour que ça ait de la valeur ! Dans un Système d’Échange Local (SEL) par exemple, dès que l’on fait un échange et que l’on inscrit cet échange dans une ligne de compte, on admet qu’il y a de la valeur. Il n’y a pas besoin de faire tourner nos ordinateurs des heures et des heures pour protéger cet échange ou cette transaction.

Selon moi, la vraie valeur n’est pas dans le temps de processeur ou dans le fait que le code soit incassable. Cela peut être un choix, mais il y a un côté miroir aux alouettes, car la valeur n’est pas vraiment là.

Est-ce que Bitcoin est alors dangereux ?

Dangereux pour qui ? (sourire) La question n’est pas là : Bitcoin est là, et va certainement rester un bout de temps. Là où je me réjouis, c’est que ce projet va ouvrir la question, lancer le débat. Les gens vont se rendre compte qu’on peut créer de l’argent ! Qu’il n’y a pas besoin d’être un banquier pour créer de la monnaie.

L’argent est un protocole, une écriture, une ligne de compte, la monnaie c’est un accord au sein d’une communauté pour utiliser quelque chose comme moyen d’échange.

Donc dans le cas de Bitcoin, la communauté ce sont les internautes qui téléchargent Bitcoin et y croient. Très bien pour eux !

Charles Ponzi

Par contre, comme Stéphane Laborde l’a montré, là où Bitcoin est dangereux c’est qu’il s’agit d’un schéma de Ponzi ! Et en plus, ses créateurs détournent un peu l’attention : quand on regarde la vidéo de présentation, ça a l’air tout beau : pas de contrôle, pas de taxes etc. Ils attirent les gens en jouant sur leur exaspération et leur envie d’autre chose. Mais ils occultent le problème de la masse monétaire, qui est une question importante.

D’autant que si demain, comme cela se dessine, on aura différentes monnaies, il faudra choisir laquelle m’est utile, quelles sont les forces et faiblesses de chacune. Il faudra que les gens jugent selon des critères.

Quels sont ces critères selon toi ? En quoi Bitcoin ne répond pas à ces critères ?

Pour moi le premier problème de Bitcoin, c’est que la monnaie est rare. La limiter dès maintenant à 21 millions revient à programmer la limitation de la valeur. Et donc si ça prend comme on le voit avec le buzz ces temps-ci, la valeur, qui est rare, ne peut qu’augmenter. On est en plein dans Madoff  : premiers arrivés, premiers servis…

Or pour commencer à participer à l’économie de Bitcoin, il me faut bien des Bitcoins pour acheter quelque chose ! Donc soit je rentre dans le circuit en vendant directement du service, et à ce moment là je suis très malin et je vais gagner mes premiers Bitcoins. Mais sinon je fais comment ? Je m’endette en Bitcoins ?

La monnaie est une proposition de jeu. Avec Bitcoin, on n’est pas dans le Monopoly, mais si tu gagnes au début et que tu as bien compris le fonctionnement, tu t’en sors forcément mieux. J’ai donc l’impression que ce système n’est pas juste pour tous. Mais au moins l’avantage est que les règles sont écrites et lisibles par tous, mais ils mettent tellement en avant le reste que j’ai l’impression qu’ils veulent attirer du monde pour en profiter.

Faut-il interdire Bitcoin, comme le veulent deux sénateurs américains ?

Si quelqu’un veut interdire Bitcoin, c’est que ça touche des intérêts importants, que ça blesse encore une fois là où ça fait mal…

Curieusement, les arguments de ceux qui veulent l’interdire sont les mêmes de ceux qui veulent condamner la neutralité du Net : les pédophiles, les trafiquants de drogue, les joueurs de poker etc. Le diable est partout en fait ! Mais de toute façon ces usages ne représentent pas l’outil en tant que tel.

Pour moi c’est bon signe car ça en fait parler. Car aujourd’hui ce qui est important, c’est que les gens prennent conscience que la monnaie ne doit pas appartenir aux banques privées. C’est une erreur énorme que l’on a faite, et aujourd’hui il faut que cela revienne ou soit partagé entre les citoyens, l’État, et pourquoi pas les entreprises. Il faut libérer la monnaie, les monnaies même !

Ce qui est vraiment bien avec Bitcoin, c’est que ça montre ce qu’il est possible de faire. Donc demain quand la bulle Bitcoin aura éclaté, ceux qui vont se faire arnaquer pourront certes dire : « c’est une arnaque les monnaies machin, il faut les interdire », mais aussi : « et si on reprenait le concept de la monnaie P2P, pour en réécrire le code ? »

Et là, les gens vont commencer à réfléchir au code de la monnaie ! Et pas forcément pour arnaquer les autres, mais pour trouver le code qui permette d’échanger dans le temps, avec les générations futures. Et ainsi définir la monnaie que l’on veut créer. Maintenant que c’est techniquement faisable, il est fort possible que l’on voit un foisonnement d’initiatives.

Et on est pas forcément dans le winner takes all [en], le premier le plus fort qui écrase tous les autres. Si les monnaies sont complémentaires, si elles ont chacune des secteurs bien définis, ce n’est pas impossible de les voir cohabiter.

Mais est-ce que cela ne va pas devenir un peu compliqué au quotidien ?

On aurait dit la même chose des médias il y a trente ans, quand il y avait juste la radio. On écoutait juste une seule voix, alors qu’aujourd’hui on lit dix blogs, la radio, un peu de télé, et un magazine, etc. On ne lit pas tout, mais on choisit les sources qui, en fonction de nos besoins, nous correspondent. Et dans la mesure où c’est aujourd’hui totalement dématérialisable, cela sera d’autant plus facile. Avec ta carte bleue, tu taperas 1 pour payer en euros, 2 pour les Bitcoins, ou 3 pour la monnaie locale du quartier. Une fois que c’est dématérialisé, c’est assez facile.

Le blog d’Étienne Hayem (aka @zoupic)

Photo PaternitéPartage selon les Conditions Initiales Mukumbura ; Wikimédia Paternité epSos.de

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Bitcoin: de la révolution monétaire au Ponzi 2.0 http://owni.fr/2011/06/15/bitcoin-revolution-monetaire-ponzi/ http://owni.fr/2011/06/15/bitcoin-revolution-monetaire-ponzi/#comments Wed, 15 Jun 2011 17:13:16 +0000 Stanislas Jourdan http://owni.fr/?p=67811 Toucher aux règles monétaires n’a rien d’anecdotique. Lorsque nous dépensons, que nous travaillons, tous les jours, ce que nous faisons a un rapport avec la monnaie, sans même que nous y pensions.

Que se passe-t-il alors lorsque des geeks créent une monnaie universelle, décentralisée, sécurisée, anonyme ? Lorsque ceux-ci peuvent faire du commerce en dehors de toute forme de contrôle, qu’il soit bancaire, étatique, ou fiscal ?

En apparence, une révolution. Mais à condition de ne pas reproduire les méfaits que l’on veut combattre.

Qu’est-ce que bitcoin ?

Bitcoin est une monnaie virtuelle créée en 2009 par Satoshi Nakamoto, un personnage mystérieux dont personne ne connait la véritable identité. Ce dernier, empruntant de vieilles idées issues des années 90, publia un document (pdf) décrivant les caractéristiques d’une monnaie décentralisée :

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Bitcoin est donc deux choses à la fois : il s’agit tout d’abord d’un outil très basique de gestion de portefeuille, un logiciel open-source que tout le monde peut télécharger et lancer depuis son ordinateur. Mais bitcoin, c’est surtout un protocole d’échange monétaire : en combinant le code de bitcoin et la puissance du réseau P2P, un système monétaire totalement alternatif est ainsi créé.

Un système monétaire sécurisé, anonyme, et pourtant sans banque ni aucune autorité centrale.

Comment ça marche ?

Pour fonctionner, bitcoin a besoin d’une puissance de calcul afin de vérifier et archiver les transactions effectuées. Concrètement, il faut donc que des personnes mettent leur processeur d’ordinateur à disposition du réseau. Pour les inciter à le faire, condition nécessaire au bon fonctionnement du réseau, Satoshi Nakamoto a eu une idée assez originale : rémunérer ces personnes par l’émission de nouveaux bitcoins.

Il suffit de cliquer sur un bouton pour participer au réseau

A chaque fois qu’un pair du réseau résout l’algorithme permettant de boucler un bloc de transactions et ainsi maintenir à jour le registre des transactions, il est crédité de quelques bitcoins, faisant ainsi croître progressivement la masse monétaire, qui atteint aujourd’hui environ 6.540.300 bitcoins.

Mais, de manière assez étrange, Satoshi Nakamoto a programmé bitcoin pour que la masse monétaire tende à une limite de 21 millions de bitcoins d’ici 2030 environ. Du coup, plus le temps passe, plus il devient difficile d’obtenir des bitcoins. Ce qui n’est pas sans poser quelques problèmes comme nous allons le voir plus loin.

Chaque participant, en téléchargeant bitcoin sur son ordinateur, peut gérer lui même son dépôt de bitcoins, sans intermédiaire : il est maître de ses données. Le logiciel attribue automatiquement un numéro de compte unique permettant de recevoir des transactions. Tout le monde peut ainsi librement échanger des bitcoins avec d’autres personnes à travers le monde, sans aucune taxe.

A chaque fois qu’une transaction est effectuée, le logiciel notifie les autres nœuds du réseau auxquels il est connecté. Ces nœuds se chargent alors de vérifier que cette transaction n’a été effectuée qu’une seule fois, et tiennent petit à petit à jour un registre, partagé dans le réseau, de toutes les transactions effectuées.

De cette manière, personne ne peut créer de fausse monnaie, ou “multiplier la monnaie” comme le font aujourd’hui les banques lorsqu’elles émettent des crédits. Chaque unité de monnaie n’appartient qu’à une seule personne à la fois.

Aujourd’hui, l’économie des bitcoin représente environ 130 millions de dollars, et les usages sont très divers : de la vente de noms de domaines, de l’hébergement, entre autres… Certains se servent aussi de bitcoin pour éviter les frais de change. WikiLeaks le proposent comme moyens de paiement pour recevoir des dons. De même, le site (illégal) de vente de drogue en ligne Silk Road l’a adopté comme unique moyen de paiement, faisant ainsi bénéficier aux internautes de l’anonymat du système. Ce genre d’usages sert d’ailleurs de prétexte à deux sénateurs américains qui demandent l’interdiction de Bitcoin.

Y-a-t-il une « bulle bitcoin » ?

Comme la convertibilité du bitcoin en plusieurs monnaies étrangères est assurée par des sites comme MtGox.com ou Tradehill.com, certains s’amusent aussi à spéculer sur le cours du bitcoin. En effet, comme la volatilité du bitcoin est très forte depuis les dernières semaines, il est possible de réaliser de très grosses plus-values.

Du coup, un grand débat a lieu ces temps-ci sur Internet pour savoir si le bitcoin est surévalué, s’il y a une bulle spéculative, ou s’il ne s’agit tout simplement pas d’une arnaque.

L’avantage de bitcoin est que le système est totalement transparent : du code source du logiciel que vous installez, au nombre de bitcoin en circulation, toute l’information est disponible.

Contrairement aux monnaies officielles, la confiance n’a pas besoin d’être instaurée par un gouvernement ou une banque centrale : elle émane d’un accord des participants avec les règles qui régissent le système ; code is law, comme on dit chez les geeks. Si des gens utilisent bitcoin aujourd’hui, c’est donc que les règles sont suffisamment claires, acceptées, et que le système est sécurisé pour que la confiance s’établisse.

Que bitcoin fasse l’objet d’une activité spéculative importante est un fait. Mais est-ce que la seule spéculation explique la valeur actuelle du bitcoin ? Certaines raisons tendent à prouver que non :

  • Bitcoin voit le jour dans une période de grands troubles monétaires. Le dollar est sur le point de s’effondrer sous le poids de la dette américaine et de la politique de la FED (la banque centrale américaine), alors que dans le même temps l’euro est sous menace d’un éclatement. Bref, ces monnaies dites de “réserve de valeur” vont très probablement perdre leur valeur dans les prochains mois par la mise en route de la planche à billet, et de l’inflation qui en résultera. Ces monnaies sont actuellement sujette à une grande défiance comme le montre la montée des valeurs refuges telles que l’or et de l’argent.
  • Face à la montée de ce risque, bitcoin se présente non seulement comme une valeur refuge, mais aussi comme un moyen de paiement alternatif. En effet, même si bitcoin n’a pas de valeur sous-jacente (comme autrefois le dollar était rattaché à l’or), il demeure un système monétaire dont la création est strictement contrôlée. Il s’agit donc d’une monnaie rare, certains la comparent même à une matière première virtuelle. Bref, un placement utile en temps de crise.

Pour toutes ces raisons, bitcoin est une monnaie alternative intéressante, et l’engouement qu’il suscite est logique compte tenu du contexte actuel.

Le retour du “Ponzi scheme”

Pourtant, tout n’est pas parfait dans les règles monétaires de bitcoin, et notamment la question de la création monétaire qui agite beaucoup la communauté.

L’idée de Satushio Nakamoto de récompenser ceux qui contribuent à la santé du réseau est d’un coté assez astucieuse : elle incite les premiers early adopters à venir “miner” afin de gagner des bitcoins, et ainsi à contribuer à l’élargissement de la communauté. En effet, plus la communauté grossit, plus il y a de nouveaux biens et services pouvant être échangés. La valeur du bitcoin augmente donc logiquement.

Mais le système est aussi très injuste, car le degré de difficulté du minage est configuré de manière à augmenter progressivement, afin de freiner la croissance de la masse monétaire, limitée à terme à 21 millions d’unités. Du coup, alors que les premiers utilisateurs de bitcoin pouvaient – aux premières heures – empocher jusqu’à 50 bitcoin en une semaine, il faut aujourd’hui quelques semaines pour gagner le moindre bitcoin (et encore, selon la puissance de votre processeur…). Aujourd’hui, la difficulté du mining est telle qu’il est parfois préférable d’acheter directement des bitcoin avec des euros plutôt que de faire chauffer sa bécane des nuits durant. D’autres optent pour des stratégies alternatives en créant des pools de mining (ils mettent en commun les ressources de leurs ordinateurs) , ou insèrent des codes javascript dans leurs pages web afin d’exploiter la puissance de calcul de l’ordinateur de leurs visiteurs, à leur insu.

On constate donc une asymétrie des droits entre les premiers utilisateurs de bitcoin et les nouveaux arrivants qui n’est pas sans rappeler le tristement célèbre schéma de Ponzi, comme l’explique Stéphane Laborde de creationmonetaire.info :

La pyramide bitcoin est uniquement temporelle et non spatiale, puisque dans l’espace, personne n’est privilégié vis à vis de la création monétaire : à un instant t, chaque utilisateur peut générer un bitcoin, où qu’il se trouve.

Mais temporellement, ça ne marche pas parce que la quantité totale de monnaie est limitée. Il arrive un temps t où de même que le pic pétrolier, on arrivera à une expansion maximale. Du coup les derniers entrants, toujours plus nombreux, en réalisant des échanges, verront leurs valeurs ne pas susciter d’échanges plus importants, et gagneront de moins en moins de bitcoin avec des investissements toujours plus lourds.

En fait, les derniers entrants sont floués, parce que la création monétaire ne s’est faite que pour les premiers entrants, n’alimentant le circuit que pour eux.

Que reste-t-il des ruées vers l’or, à part des villes fantômes ?

La révolution inachevée

Bitcoin est à n’en pas douter une prouesse technologique. Et le fait que certains veuillent l’interdire est loin d’être anodin : bitcoin constitue une menace pour le capitalisme financier et les gouvernements. Mais est-ce pour autant une véritable monnaie, telle que définie par Bernard Lietaer à savoir un « un accord au sein d’une communauté pour utiliser quelque chose comme moyen d’échange » ?

Plus qu’une monnaie comme protocole d’échange, Bitcoin tente de ressusciter une sorte d’étalon-or, dont la valeur est garantie par sa rareté. Mais cette rareté a-t-elle un sens dans un monde numérique inondé d’abondance ?


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Retrouvez les autres articles du dossier sur les bulles économiques :

Gaz de schiste, les nouveaux subprimes ?

Grand Paris, énergie, économie… PYRAMIDES DE PONZI !

Une Loguy pour OWNI /-)

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Monnaies virtuelles: une révolution fiscale? http://owni.fr/2011/06/04/monnaies-virtuelles-une-revolution-fiscale/ http://owni.fr/2011/06/04/monnaies-virtuelles-une-revolution-fiscale/#comments Sat, 04 Jun 2011 10:26:57 +0000 Rick Falkvinge http://owni.fr/?p=65850
Article initialement publié sur OWNI.eu.


Nul doute que les monnaies cryptées vont continuer à se développer. Les nouveaux usages qu’elles permettent emportent haut la main la lutte contre les banques dont nous avons hérité les systèmes de transaction sur rendez-vous, au cas par cas. Quid des jours fériés ? Quid des avoirs gelés ? Des frais bancaires ? Tout ces concepts sont devenus obsolètes et non-pertinents.

Il se peut que Bitcoin ne devienne pas le standard ultime des monnaies chiffrées, mais ce n’est pas important. C’est comme pour le partage de fichiers : peu importe que les gens utilisent Bitorrent, OneSwarm ou un autre logiciel plus performant encore. C’est le concept de partage de fichiers qui est intéressant, pas le logiciel.

Il y a une certaine extase au moment de transférer quelques centimes de bitcoins à quelqu’un situé à l’autre bout de la planète. Le fait qu’il reçoive cet argent instantanément, sans intermédiaire, et sans personne pour s’y opposer (à moins qu’elle vienne s’en prendre physiquement à moi), est assez enthousiasmant. Cette sensation est profonde. Tout comme les ramifications. Mais dans cet article, je voudrais me concentrer sur les implications politiques des monnaies chiffrées.

Pour l’instant, les cas d’usage des monnaies chiffrées sont limités par l’effet de réseau. Vous ne pouvez pas vraiment utiliser bitcoin pour des choses concrètes. Mais d’un point de vue politique, le développement de ces monnaies signifie que les systèmes de sécurité sociale et de taxation doivent être repensés et réformés aussi rapidement que profondément.

Repenser la fiscalité dans un monde de monnaies virtuelles chiffrées

Avec les monnaies chiffrées, le gouvernement ne peut pas inspecter la richesse des individus, ni leurs revenus ou leurs dépenses. Et ce y compris en faisant usage de la force. Je connais beaucoup de gens dans le gouvernement qui – victimes classiques du biais de la normalité – vont se dire : “mais nous devons pouvoir le faire !”. Mais peu importe, vous ne pourrez pas. Point barre.

Autrement dit, ni le système fiscal, ni la protection sociale ne peuvent être conditionnés au revenu ou à la fortune. Même si seulement 5% de la population utilise des monnaies cryptées, la morale fiscale implique de s’assurer que tout le monde ait le sentiment de payer de manière juste et que les fraudeurs courent un risque crédible d’être puni. Avec les monnaies chiffrées, le contrat social se retrouve brisé.

Et comme nous y arriverons inéluctablement d’ici une décennie, ce n’est pas le moment de faire l’autruche.

Commençons par le problème fiscal. L’imposition ne pourra plus être basée sur un revenu ou sur le patrimoine : de l’impôt sur le revenu aux taxes patronales et salariales, ces ressources passeront par la fenêtre – remarquez, le coté positif, c’est que par définition, le travail illégal cessera d’exister.

Que reste-il donc à taxer ? Nous pouvons imposer le foncier comme nous le faisions au XIXème siècle. Mais bon, ça ferait justement un peu trop XIXème siècle, non ? Alors quoi d’autre ? Nous pouvons taxer les immeubles, les maisons, les voitures, l’essence…. et toutes ces taxes si impopulaires. Très bien, mais nous pouvons aussi taxer la consommation.

La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est déjà l’une des premières ressources fiscales des gouvernements européens. C’est un système différent d’une simple taxe à la vente dans le sens où elle est appliquée à chaque étape de la chaîne de production jusqu’à la vente finale. En admettant que nous ayons une TVA à 25%, le fabricant d’origine ajoute cette taxe à son prix global. Puis le revendeur se fait rembourser sa TVA auprès du gouvernement, mais ajoute à nouveau 25% à ses prix. Ce système crée un effet positif car cela incite chaque maillon de la chaîne à déclarer les taxes qu’il perçoit, puisqu’il peut ainsi se faire rembourser la TVA précédemment payée.

Si l’on regarde les chiffres de la Finlande et de la France, on se rend compte qu’en doublant le taux de TVA, on pourrait abolir tous les autres impôts sur la personne. La pression fiscale resterait la même, tout comme les revenus de l’État. En fait, seule l’assiette fiscale changerait : on taxerait la consommation plutôt que le revenu, mais ces deux variables sont de toute façon très corrélées en théorie.

Ce système comporte deux autres avantages. Le premier est évidemment l’abandon de l’impôt sur les personnes physiques. Plus aucun citoyen n’aurait de comptes à rendre à une quelconque autorité fiscale. Plus jamais. Seules les entreprises seraient concernées, en tant que collecteurs d’impôt (même si au final, c’est bien les ménages qui sont taxés via leur consommation).

Le second avantage, c’est que l’infrastructure et la bureaucratie sont déjà en place. Il suffirait simplement d’ajuster un pourcentage. Une fois cela fait, un bon paquet de fonctionnaires (ceux qui s’occupent de l’administration des autres taxes) pourront juste arrêter leur travail.

Mais bien sûr, il y a aussi des inconvénients. Le premier est que l’imposition serait parfaitement plate. Cela toucherait donc plus durement les moins fortunés, ce que nous voulons éviter. La taxation progressive est généralement perçue comme un aspect juste et équitable d’une société viable.

Afin de rétablir la progressivité de l’imposition, le moyen le plus normal serait d’instaurer une réduction d’imposition. Mais cela est difficilement applicable avec la TVA : il faudrait un système de traçabilité des dépenses, permettant à chacun de prouver qu’il n’a pas dépassé son quota de crédit de TVA… Je vous laisse imaginer la tête de votre kiosquier quand vous achèterez votre journal à 1,2€.

Bref, il faut tourner le problème dans un autre sens.

Repenser l’état providence

Les systèmes de protection sociale ont toujours été basés sur un manque de revenu, de richesse, ou des deux. Mais si on ne peut plus les mesurer, que fait-on ?

Je ne vois que deux options : soit vous donnez à personne, soit vous donnez à tout le monde. Or, comme donner à personne n’est pas vraiment une option, il ne nous reste que la possibilité de donner à tous, sans aucune condition. C’est le scénario du revenu de base inconditionnel, le salaire citoyen.

Ce système ferait d’une pierre deux coups, puisque la combinaison de la taxation unique sur les dépenses et le revenu de base universel équivaut en fait à une réduction d’impôt de base. En effet, jusqu’à ce que le montant de TVA payée atteigne le revenu de base perçu, c’est comme si vous n’aviez rien payé. Et en plus, vous avez un revenu minimum de subsistance. Ce que nous avons déjà, d’une certaine façon.

Ce système aurait aussi pour effet positif de supprimer la nécessité d’autres systèmes de protection sociale, des allocations chômage aux prêts étudiants, et toute la bureaucratie qui va avec.

Certaines personnes prétendent que ce salaire citoyen tuerait toute motivation à travailler. J’ai déjà répondu à ces objections. En version courte : GNU/Linux et Wikipédia.

La fin de l’imposition des revenus

Les monnaies chiffrées arrivent de toute façon. Qu’il s’agisse de bitcoin ou d’autre chose, ou même d’un nouveau protocole d’échange qui utilise plusieurs monnaies différentes. Ce qui est important de comprendre, c’est qu’en moins d’une décennie, nous aurons perdu notre capacité à capter la richesse et les revenus des citoyens.

Cela signifie alors qu’il ne peut y avoir de système fiscal basé sur l’imposition des richesses ou des revenus.

Je pense que le moyen le plus approprié de faire face à ce problème, est de déplacer l’assiette d’imposition sur la consommation et ainsi transvaser l’imposition sur le revenu vers la TVA. Pour conserver la progressivité de l’imposition, ainsi que pour conserver une protection sociale fonctionnelle, nous aurons aussi besoin de combiner ce système avec un revenu de base inconditionnel accordé à chaque citoyen, afin de garantir une certaine subsistance.


Article initialement publié sur le site de Rick Flakvinge.

Traduction : Stanislas Jourdan

Illustrations CC FlickR: matthileo, Ivan Walsh, Muffet
Retrouvez notre dossier sur le Bitcoin et les monnaies virtuelles :
Bitcoin: de la révolution monétaire au Ponzi 2.0
[APP] une autre monnaie est possible : une BD augmentée
Napster de la banque: prochain cauchemar des gouvernements?

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